« Je regardais à l’extérieur de moi et j’essayais de comprendre le monde dans lequel je vivais et où je semblais évoluer. J’identifiais ma famille, mes enfants, la société dans laquelle je vivais et je m’y raccrochais fermement. Et si ce n’était pas suffisant pour me reconnaître, je fouillais dans un autre monde ou dans mes vies antérieures pour justifier la personne en voie d’évolution que je voulais devenir. Je croyais au temps d’apprentissage.
Je pouvais me retrouver en état de peur, de tristesse, de recherche ou en état de joie, de satisfaction, de contentement. Je me cachais ou je m’exposais. J’essayais d’établir des liens avec ce monde qui grouillait autour de moi, car je croyais que c’était ça la vie : le monde des relations. Je croyais que l’amour (sous toutes ses formes) allait m’apaiser et qu’à un moment donné j’allais être heureuse et atteindre le nirvana.
J’établissais une relation avec une autre personne et je l’idéalisais : relation de travail, de couple, connaissances, amis… J’établissais une relation avec moi-même et je l’idéalisais : Dieu, la mère aimante, l’amie aidante, le médium, la caractérielle, la Betty spirituelle, la femme forte, la petite fille souffrante, l’âme pieuse. J’établissais une relation avec le monde et je l’idéalisais : la nature, les animaux, l’alimentation, les techniques corporelles…
Quel est ce mouvement de la pensée qui idéalise, qui veut être en relation avec autre chose? C’est tout simplement la négation du moment présent! Je voulais me débarrasser du moment présent! Alors je créais une distance entre mon idéal et moi : je créais le temps. Je créais une distance entre le moment présent et ce que je voulais avoir ou être dans le futur. Et là je construisais ma tour de Babel! Pourquoi?
Ce que je Suis ne peut être compatible avec ce que je veux être! Je suis en conflit perpétuel avec moi-même : je me fais violence! Tout ce monde qui est perçu à l’extérieur de moi sera adapté à mon idéal d’être autre chose que… Et dans le temps, il ne peut y avoir que confusion, car il y a l’intervention de la mémoire conditionnée par le passé, la mémoire cellulaire, la société, la culture, la souffrance personnelle, le délire de se croire une personne capable de comprendre et de résoudre toutes les situations.
Et puis, vient la reconnaissance de ce mouvement : l’observation dans le rêve. Et la décision de dompter ce mouvement, d’arrêter la pensée, de calmer les émotions, de poursuivre ses bibittes et de les anéantir! Je regarde cet écart que j’ai créé et je m’observe dans cet écart. Un grand sentiment de confusion s’installe! Et puis il y a l’arrêt! « Ok je vais arrêter et ne rien faire. » Et l’observation de l’arrêt : « Je suis arrêtée, mais pourtant je ressens encore la tristesse, la déception, la platitude de la vie. »
Que se passe-t-il? Je ne peux identifier ce malaise inconscient et ça me frustre et j’ai cette impression d’injustice divine. J’étouffe d’être moi! J’ai créé le temps et maintenant je ne le veux plus! Je ne veux plus laisser au temps le temps de s’écouler! Ce temps que j’ai créé pour qu’il me serve ne me sert plus. Je regarde et je constate qu’il y a une différence entre moi et ce que je pense devoir devenir! Je compare, je suis piégée encore une fois. C’est la personnalité qui veut diriger jusqu’au bout! Tout cela appartient au monde complexe du rêve, c’est une illusion.
Lorsque l’on arrête de rêver, on constate qu’il n’y a pas de distance entre quoi que ce soit! Pas de temps, pas d’idéal à atteindre, pas d’éveil à attendre et à atteindre pour personne! C’est l’arrêt du rêve, sans délai. L’arrêt du rêve! L’accueil de l’inconnu. Pas l’inconnu qui est le contraire du connu et qui doit bien être caché de ma mémoire consciente actuellement. L’inconnu, l’inimaginable : le mouvement frais, effervescent, non retenu, informe, là où rien ne commence, rien ne meurt. La Source vive!
Je perçois : je suis! Pas d’inventions de temps pour délirer! Le carburant du mécanisme de la pensée n’existe plus car l’individu n’existe plus. La Vie est partout dans le corps, dans les plantes, dans les oiseaux, dans le vent, dans le soleil, partout et Je suis la Vie qui s’expérimente. Je suis Cela!
Où est l’amour dont on parle dans le rêve? L’amour que tout le monde veut garder? Oui, je veux bien m’éveiller du rêve, mais la relation de couple m’intéresse encore, la relation avec mes enfants m’intéresse encore, la relation avec moi-même m’intéresse encore, le monde m’intéresse encore…
Et qu’est ce que l’Amour finalement? Est-ce ce partage de confusions? Est-ce ce partage de son propre système de pensée que l’on veut imposer aux autres pour se satisfaire? Le partage de la course qui vous mènera à votre idéal? L’image insatisfaisante que vous avez de vous et qui court dans le temps pour rejoindre une image inventée par vous-même! Un idéal! La personnalité qui pense aimer! Et qui veut à tout prix partager sa croyance! Dans un labyrinthe de pensées, d’émotions, de buts, de désirs de conclure! Est-ce bien ça l’amour inconditionnel qui vous coûte la perception directe?
Ou est-ce le partage de la Présence?
À ce moment, dans le vide vibrant où la personnalité est absente, où la violence n’existe plus, où les fragments d’amour à distribuer n’existent plus. L’Amour est la Présence et la Présence EST. »
Profonde gratitude
Betty
source : La grande Joie