par Bertrand Duhaime
La compassion désigne la vertu ou la qualité spirituelle de l’être amoureux qui souhaite le bien à tous les êtres sans exception et qui se détermine à toujours faire du bien aux autres, ce qui l’amène à exprimer pour tout une empathie d’autant plus profonde que sincère, soit le désir de le soulager dans la mesure de ses possibilités et de son droit d’intervenir.
Ainsi, la compassion exprime l’exercice désintéressé de la charité auprès des plus faibles et des plus démunis, dans la mesure qu’ils peuvent et savent se prendre en main. La compassion n’est pas apitoiement, elle est détachement, elle est confiance dans la Lumière toute-puissante et omniprésente, elle est lien authentique à la Source des Sources en soi-même. La compassion invite à se relier à l’Un pour être avec tous et se donner entièrement. Un être n’abandonne jamais personne et il ne tourne le dos à personne en se reliant à sa propre Lumière intérieure. Au contraire, en choisissant de se donner à sa propre Lumière, pour qu’elle réalise son propre travail, il évite de se laisser entraîner sur une voie où il ne serait pas juste d’aller et de s’égarer, une voie d’illusion : illusion d’aider, de sauver, d’être utile, de faire quelque chose, de remédier à une situation. Mais il faut garder le cœur ouvert, car, par une connaissance intime du prochain, chacun peut l’aider de façon efficace et désintéressée, dans la mesure de ses compétences, de ses connaissances, de ses moyens, de son degré d’amour. Cependant, le cœur ne peut rester pleinement ouvert que s’il échappe à la confusion qui pousse à sacrifier sa Lumière pour aller porter de l’aide à une situation particulière qui, certes, peut en avoir besoin, mais où ce n’est pas à soi de choisir ce qu’il faut faire.
Plus précisément, la compassion consiste à prendre une partie de l’obscurité d’autrui, s’il en est digne, pour accélérer l’illumination de la planète et de l’Humanité. Mais cette prise en charge d’une part de l’obscurité de l’autre ne peut s’effectuer que par sa Lumière interne, qui est baume en elle-même. Cette planète appartient à tous, mais peu s’élisent à la tâche de la guérir et de la faire évoluer. Or, certains niveaux de conscience seront interdits tant que le plus retardataire n’aura pas franchi les Portails de l’Illumination. Chacun garde donc un intérêt, à un certain stade de notre évolution, au moment permis par les Maîtres, mais pas avant, à revenir en arrière pour aider les plus obscurcis qui cheminent sur le même Sentier évolutif que lui.
La compassion se distingue de la pitié en ce sens qu’elle ne s’apitoie en rien sur le sort des autres et n’en juge pas et de la commisération en ce qu’elle n’amène pas à prendre à sa charge le destin des autres ou à souffrir, avec eux, de ce qu’il leur arrive. Elle découle de la compréhension profonde du sens de la souffrance qui permet de percevoir les difficultés des autres dans leur véritable valeur, soit dans leur fonction exemplaire, voire initiatique. Ainsi, elle confine au non jugement et à la non-intervention, soit au refus de les supprimer tant qu’elles jouent un rôle évolutif dans la vie d’un sujet, ce qui constituerait un geste arbitraire. De ce fait, la compassion n’invite pas à verser des larmes sur l’état du monde ou des autres, même s’ils sont en pleine détresse morale ou spirituelle, hurlent à l’injustice, mais à leur donner les moyens et la force de changer dans un sens évolutif. On y parvient en se centrant et en se maintenant hors du drame qui est vécu, pour mieux observer la situation et ressentir la peur, la douleur, le désarroi ou la colère qu’elle contient, mais sans leur répondre dans la même gamme vibratoire. Ainsi, on évite de la nourrir et de lui accorder de l’énergie, par sa pensée ou son ressenti, de sorte qu’elle puisse d’épuiser et disparaître à tout jamais. Car il importe que celui qui est affligé puisse comprendre, dans sa situation problématique, qu’il fait preuve de manque de mémoire par rapport à l’origine de ses difficultés.
La Bhagavad-Gitâ, un livre sacré de la Tradition hindoue, proclame que le premier exercice de charité consiste à appuyer les Guides spirituels incarnés dans leurs projets visant à faire rayonner la Lumière divine, un appui qui doit prendre la forme d’une offrande proportionnée à ses moyens. Elle ajoute que la charité peut parfois s’adresser aux pauvres, si on sait le faire avec discernement et détachement, sans jugement et sans désir de valorisation. Mais si ces pauvres ne savent pas se prendre en main ou ne veulent pas le faire, témoignant par là de leur indignité à recevoir, quelqu’un ne recevrait aucun bienfait spirituel à les aider. En outre, tout geste charitable rien qu’en apparence, parce qu’il est posé avec effort ou par obligation y est dit relever de la passion, plus précisément de la possessivité. Enfin, elle précise que toute charité qui encourage la sensualité relève de l’ignorance, presque de la perversion.
Quoiqu’il en soit, l’être compatissant ne juge personne, concevant toute expérience humaine digne d’être vécue, si différente qu’elle paraisse de la sienne et si marginale que prenne sa forme d’expression. La compassion implique un élan d’amour irrésistible qui demande à servir l’Unité de la Grande Cause. Autrement dit, elle se fonde sur un amour infini né de la conscience de l’unité de tout ce qui vit qui amène à se sentir un avec tout et avec le Tout. Voilà pourquoi elle comporte toujours une prise de conscience de tous les éléments qui sont en jeu dans une situation donnée et la possibilité que ses perceptions s’élargissent de manière à embrasser la totalité du tableau par rapport à ce qui se passe vraiment. Invitant à dépasser les apparences et les illusions, elle invite à contempler la perfection du jeu de la Lumière et de l’Obscurité. Elle permet de comprendre l’Énergie cosmique dans son mouvement créatif dans la Réalité, soit au-delà de ce qui est perçu par les sensations et les sentiments. Elle permet de percevoir le Plan cosmique et de transcender les méandres de la pensée et des sentiments limités afin de parvenir à s’élever dans une harmonie supérieure, au niveau du ressenti et de la respiration, afin de capter le rythme universel.
Depuis le déclenchement du processus accéléré de l’Ascension, la compassion dans les actes est désormais interdite sur la Terre, histoire de permettre à chaque être humain, alors qu’il reste bien peu de travail à faire, de se prendre lui-même en main, de manière à effectuer ses propres choix et à assumer son propre destin. Il ne reste plus qu’à exprimer son empathie et à rayonner la Lumière acquise.
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