Nos villes ne savent plus quoi faire de leurs déchets. Nous dépensons des milliards pour tenter de les recycler. Et si on s’inspirait de la nature ?
Face aux problèmes qui se posent à nous au cours de la crise environnementale présente, nous cherchons des solutions dans les leçons que nous pouvons tirer du comportement de la nature (pour les besoins de la discussion, je distingue artificiellement les activités humaines des activités naturelles). Comment est-elle arrivée à gérer aussi habilement, depuis plusieurs milliards d’années, l’ensemble des activités infiniment diverses qui se passent sur la Terre. A-t-elle des secrets que nous pourrions lui emprunter ?
Elle en a à coup sûr ! Il en est un que nous pouvons résumer ainsi : la nature ne fait pas de déchets. Elle utilise et recycle tout. Par exemple, dans la forêt, les animaux morts deviennent la nourriture de charognards et de nombreux insectes. Les feuilles mortes sont happées dans le sol par les vers de terre qui les mangent et restituent à la terre ce que nous qualifions d’excréments et qui sont de fait des éléments fertilisants. Celles qui restent en surface se décomposent sous l’action de bactéries et se transforment en humus qui nourrit les plantes mangées par les herbivores, eux-mêmes mangés par les carnivores … La chaîne est sans fin.
Chez les économistes, cet idéal s’appelle « économie circulaire ». Et notre ami Emmanuel Delannoy en est un grand partisan, lui qui dirige l’Institut Inspire pour « réconcilier développement économique et biosphère ». C’est un allié d’Humanité & Biodiversité dans les tables rondes qui abordent ce dossier. L’expression parfois utilisée « cradle to cradle » (du berceau au berceau) indique que rien ne se perd, il n’y a pas de matière inutilisée. Telle n’est pas, et de loin, la situation chez les humains.
Mexico et Rio génèrent plus dix mille tonnes de déchets par jour
La masse des déchets qu’ils accumulent atteint des proportions gigantesques et s’accroît à une vitesse telle que de nombreuses villes sont largement dépassées par la situation. Mexico et Rio de Janeiro en génèrent aujourd’hui plus dix mille tonnes par jour, ce qui représente une file de camions longue de dix kilomètres. Des décharges immenses sont souvent déjà débordantes dans plusieurs pays d’Asie et d’Afrique. Elles constituent des lieux de grande insalubrité. Ces paysages de désolation illustrent dramatiquement les difficultés des humains à gérer leur planète.
À l’échelle mondiale, la quantité de déchets a été multipliée par dix par rapport au siècle dernier et, avec la hausse du niveau de vie dans les pays asiatiques, elle pourrait augmenter d’un facteur cinq avant la fin de ce siècle si des mesures drastiques ne sont pas prises.
Plusieurs villes ont déjà décidé de s’attaquer à la situation. En Californie, San Francisco s’est imposé un objectif de zéro déchet en 2020 par réduction et recyclage. Elle a déjà atteint la moitié de son objectif. Les échanges et la réutilisation des matériaux comme le papier, le verre, le ciment et l’acier sont déjà effectifs. Mais ces activités sont encore relativement peu présentes dans les pays défavorisés qui ont la plus grande augmentation du niveau de déchets.
Ces propos ont pour but de porter l’attention sur un des aspects généralement peu connus de la crise écologique contemporaine. Le mot « écologie » se réfère à la tenue de la maison (Oikos en grec est la maison). C’est bien de notre tenue de la maison terrestre qu’il s’agit ici.
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Référence de la lecture qui m’a inspiré ce billet: « Waste production must peak this century » : Nature vol 502 – oct 2013 – page 615. Le Point.fr