Failles_temporelles
Les failles et autres trous dans notre espace-temps sont des phénomènes communs, voire récurrents, dans la littérature de science-fiction. 

Des progrès récents en physique laissent cependant entrevoir la possibilité que ces phénomènes ne soient pas condamnés à rester cantonner à notre imaginaire. Le professeur entend bien rendre ce fantasme bien réel en établissant un laboratoire…

Un trou dans le temps

Les recherches du professeur Moti Fridman se placent dans le cadre très général qu’est l’étude des différentes formes d’invisibilité. Néanmoins, sa démarche diffère sensiblement des pistes généralement explorées dans les laboratoires de recherche. En effet, les scientifiques travaillant sur ce sujet s’efforcent généralement de rendre invisible un objet en minimisant son impact sur son l’environnement, notamment en termes d’ondes sonores ou d’ondes électro-magnétiques. Sa présence devient ainsi difficilement détectable, à moins d’avoir des appareils de mesure suffisamment précis. C’est le principe de base sur lequel reposent la furtivité en aéronautique, et également de nombreuses recherches sur ce qui pourrait s’apparenter à une cape d’invisibilité.

Dans le cas de ce nouveau laboratoire de l’Université de Bar-Ilan, le projet explore une piste complètement orthogonale. En effet, au lieu de chercher à rendre invisible un objet particulier, le professeur Moti Fridman et son équipe s’évertuent à créer un trou dans l’espace-temps lui même, rendant par ce biais indétectable tout élément présent à un instant et une position précis.

Lentilles temporelles

La recherche sur cet effet physique surprenant est en réalité très récente. Ce dernier a pu être mis en évidence pour la première fois en 2012 par une équipe comprenant justement Moti Fridman, alors en post-doctorat à l’université de Cornell aux Etats-Unis. Cette découverte repose sur l’utilisation d’un dispositif appelé lentilles temporelles. De manière analogue aux lentilles classiques qui concentrent un faisceau lumineux en un point, ces dernières cherchent à concentrer un signal sur l’axe du temps, en agissant sur sa vitesse de propagation.

Pour cela, les physiciens utilisent des fibres optiques qui agissent différemment suivant la fréquence d’un signal électro-magnétique. Plus précisément, dans l’expérience en question, les ondes ultraviolettes sont accélérées alors que les infra-rouges sont ralenties. Ce double comportement produit dans l’espace-temps un court instant indétectable par le signal lumineux, après que les ondes ultraviolettes sont passées mais avant que celles dans l’infrarouge ne se présentent. Un dispositif ayant un comportement opposé permet ensuite de recréer le signal originel et ainsi donner l’illusion que rien n’a pu se passer entre l’émetteur et le capteur.

Un pas vers l’invisibilité

Notre imagination nous laisse entrevoir les nombreuses possibilités, plus ou moins légales, plus ou moins morales, qui pourraient s’offrir à nous grâce à une telle invention. La réalité scientifique est pour l’instant bien plus prosaïque, le professeur Fridman et son équipe ayant créé un trou de 1,5 centimètre par 50 picosecondes (un millième de nanoseconde).

Le chercheur israélien reste cependant confiant concernant les progrès pouvant être réalisés, espérant notamment augmenter la durée d’un facteur 10.000. Cette avancée reposerait principalement sur l’utilisation de lasers plus puissants et de fibres optiques de plus grande qualité, permettant de contrôler plus finement le flux lumineux. Nul doute que le chemin à parcourir est donc encore important avant d’arriver à une quelconque application, mais vu le jeune âge du procédé, l’optimisme reste de mise.