97954490Par Gabriel Gimenez-Roche

 

Dans les deux articles précédents, nous avons vu que le problème de la dette publique était fondé sur les relations viciées entre l’État, sa Banque Centrale et les banques commerciales. Nous avons constaté que la BC joue un rôle clé entre l’État et les banques commerciales : c’est son existence qui permet une croissance ininterrompue de la dette publique. Reste à savoir si ce schéma d’endettement peut perdurer ?

 

Un État, comme n’importe quelle autre organisation, utilise ses recettes pour payer ses dépenses courantes dont la charge de la dette (intérêt plus capital). La dette publique apparaît lorsque les dépenses courantes de l’État ont dépassé ses recettes fiscales. Il devient alors clair que le paiement de la dette sera effectif si et seulement si les dépenses courantes baissent en contrepartie d’un service de la dette qui augmente. Si avec le service de la dette, les dépenses courantes restent systématiquement plus élevées que les recettes fiscales, le paiement de la dette devient lui-même illusoire car celle-ci ne cesse de s’accumuler. Dans le même temps, le système à réserves fractionnaires débouche sur un autre problème : celui du cycle économique. La création monétaire effrénée de la BC et des banques commerciales consiste à créer trop de créances par rapport à la richesse réellement disponible dans l’économie. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le système est défendu. En effet, la justification des réserves fractionnaires repose sur l’idée que l’expansion monétaire, en permettant de financer davantage de projets, va susciter une création de richesse, susceptible justement de couvrir les nouvelles créances créées.

 

Cela serait vrai si la nouvelle monnaie créée à partir de rien n’était pas liquidée avant que les nouveaux projets productifs n’aboutissent. En effet, cette synchronisation est difficile à obtenir dans le monde réel. Les opérations financières de très court terme et la consommation croissante caractéristiques d’un boom monétaire font que la liquidation de la nouvelle monnaie arrive souvent avant la réalisation complète de nouveaux projets productifs qui sont en général des investissements de long terme en logement, énergie et télécommunications pour justement répondre à la consommation croissante.

 

Il devient alors inévitable que le boom d’investissement et de consommation qui suit l’expansion monétaire des banques finisse par la liquidation des projets inaboutis et l’éventuel risque de faillite des banques incapables de recouvrir les crédits accordés. Le manque de liquidité bancaire qui en résulte s’ajoute donc au problème de la dette publique et fait peser encore plus de pression sur l’État.

 

Un choix s’impose alors. Soit la BC injecte massivement de la liquidité dans le système pour couvrir les besoins en monnaie et ainsi sauver les banques et soutenir les projets inaboutis. Ces injections massives ont cependant pour conséquence de faire pression sur les prix et si le système s’emballe, les prix peuvent s’envoler comme dans le cas des épisodes d’hyperinflation. Ceci implique une destruction massive du pouvoir d’achat des individus et une perte de crédibilité dans l’État et dans l’économie qu’il est supposé être capable de gouverner. Le choix inflationniste ne fait que repousser la résolution de la crise et la liquidation de tous les projets improductifs. L’alternative est la banqueroute. La vague de liquidation va effectivement éliminer tous les projets qui n’auraient jamais vu le jour sans l’expansion monétaire générée par les banques. Plusieurs banques vont probablement disparaître et avec elles une bonne partie des créances de l’État.

 

A court terme, il ne faut pas se cacher la face, le système décrit au cours de nos trois articles ne peut que déboucher sur un processus déflationniste douloureux, du chômage et du capital oisif. Néanmoins, ce processus permet de rendre de nouveau accessibles les ressources productives. En effet, une fois que leur prix atteint des niveaux très bas, il redevient possible de les acquérir et d’investir. Cela marque le début de la reprise. La question est de savoir si cette reprise se produira à moyen terme – c’est-à-dire, juste après la crise – ou à long terme – autrement dit, après une longue période de stagnation. Tout dépendra des choix de l’État. Si l’État engage des réformes majeures pour assurer un équilibre fiscal sans pour autant cribler l’économie d’impôts, la reprise pourra avoir lieu à moyen terme. Cette reprise ne sera saine que si l’État interdit le rétablissement du cercle vicieux.

 

Les États-Unis et l’Europe n’ont guère d’autres alternatives aujourd’hui…

Gabriel Gimenez-Roche

Gabriel A. Giménez-Roche est professeur et responsable du département économie du Groupe ESC Troyes et maître de conférences à Sciences Po Paris. Son domaine de recherche est l’analyse économique de l’entrepreneuriat et son contexte socio-institutionnel. Il est également chercheur associé de l’Institut économique Molinari.

Source: http://www.24hgold.com/francais/

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