ecole2par Agnieszka Rouyer

Albert Camus a dit un jour que «L’école prépare les enfants à vivre dans un monde qui n’existe pas ». Le système d’éducation actuel est une relique obsolète, pleine de règles et de schémas nuisibles et limitants. Il est grand temps de dire tout haut ce qu’exactement l’école fait « mal » et pourquoi cela arrive.

Le système d’éducation actuel a été créé afin de satisfaire les besoins de l’économie industrielle des siècles passés. Il vise à former une armée de robots écervelés qui travailleront en obéissant à la conjoncture économique existante.

Un jour, un professeur que j’ai rencontré, l’a résumé très habilement :

« L’école est un musée, qui, non seulement n’assure pas l’acquisition des compétences pour faire face à la réalité, mais, qui prend soin de revigorer les compétences carrément inutiles autodestructrices de l’individu et la société (…) »

Dans cet article, je décris 14 erreurs les plus importantes du système d’éducation. Avant de les lire, je tiens à souligner que :

1. Cet article se concentre uniquement sur les aspects néfastes de notre système d’éducation. Cela ne signifie pas qu’il est totalement erroné et totalement mauvais. Je vois beaucoup d’aspects positifs sur le chemin d’évolution de nos enfants aujourd’hui. Malgré cela, l’énorme quantité de défauts du système et de son importance fait que l’ensemble du système éducatif est adapté pour aller …..à la poubelle. Le but de cet article est, justement, de mieux comprendre l’essence du problème.

2. Je critique le système éducatif, pas les enseignants ni les professeurs. Le fait est que beaucoup d’enseignants effectuent leur travail pas comme il se devrait, mais il est également vrai que les enseignants ne gagnent pas « des masses » et que personne ne leur apprend comment apprendre aux adolescents et comment se comporter avec les enfants et les adolescents, surtout ceux en difficultés. Il s’agit d’une erreur du système, pas de ses employés. Bien sûr, il existe des enseignants qui ont conscience des erreurs du système et tentent de les minimiser, voire de réparer ce qui est dans leur champ d’action (et c’est aussi le but de ce texte).

3. Si tu penses que cet article, ou une partie de cet article, contient de fausses informations, je t’invite à m’écrire à ce sujet – je suis ouverte à toute discussion.

4. En raison de la longueur du texte, dans cet article je ne décris pas de solutions ou d’alternatives à l’enseignement traditionnel. Cette question sera abordée dans un des articles suivants.

Je commence par le plus important :

1.      Le schéma de pensée « Il est mauvais de faire des erreurs »

Cette hypothèse est le pilier du système d’éducation actuel. Elle imprègne chaque cellule de sa surface avec sa présence dans la vie quotidienne de toute école. Dès la première primaire, les enfants sont victimes d’une politique de la peur, où les enseignants traitent des erreurs comme le signe d’être « moins bon » élève.

Cette façon de penser détruit la créativité des enfants et bâtit chez eux une forte sensation de peur avant d’agir et d’expérimenter. C’est la raison du stress et du trac avant les examens ou une quelconque épreuve future. Dans la plupart des cas, cela forge à tout jamais la psyché humaine et est l’une des raisons les plus importantes pour laquelle beaucoup de gens vivent une vie peu épanouissante.

Faire des erreurs fait partie intégrante et est nécessaire à l’apprentissage. Chaque être humain devrait être prêt et même s’intéresser aux fameux « échecs » – c’est le meilleur moyen d’apprendre vite en se basant sa propre expérience plutôt que sur une théorie vidée de sens.

« Je n’ai jamais permis à l’école de compromettre mon éducation. » – Mark Twain.

2. Le schéma de pensée  « Il n’existe qu’une bonne réponse à chaque question »

Cette hypothèse est également profondément enracinée dans le système éducatif et l’obéissance à ce schéma est exigée à chaque pas sur le chemin de l’éducation de l’enfant – «  Rentre dans le moule ou cesse d’exister. »

Le meilleur exemple à l’école sont les examens où l’étudiant doit parfaitement entrer dans une case qui spécifie laquelle de ses interprétations est exacte, et laquelle ne l’est pas. Toute autre idée ou réponse pleine de créativité fait, de facto, l’objet de critique par des professeurs qui se trouvent figés depuis de nombreuses années dans ces schémas stricts et rigides.

Les étudiants sont obligés de donner uniquement les réponses « valables et correctes » – on les force à avoir cet état d’esprit prédéterminé par des cases. Les enfants avec une personnalité différente, qui brisent ce strict schéma, deviennent de mauvais individus et sont traités avec mépris.

Cette approche handicape la créativité et la recherche des solutions originales. Elle tue ainsi l’innovation et la capacité à résoudre des problèmes quotidiens.

3.      Le système scolaire d’évaluation des connaissances et des comportements

Les enfants en première primaire s’arrachent carrément les places à répondre. Ils ont tellement envie de se vanter de leurs connaissances, même s’ils ne sont pas certains de cette connaissance. Plus la classe est « âgée », moins il y a de mains levées. Les jeunes savent que chaque mauvaise réponse sera aisément critiquée par le prof, donc pas la peine de prendre le risque de se faire juger.

Les jeunes apprennent très vite que leur but principal est d’obtenir de bonnes notes, et non pas d’apprendre et découvrir le monde. Ils rivalisent avec leurs camarades, font de la compétition, et sur base de leurs résultats se comparent entre eux. Ceux qui obtiennent des notes moins bonnes se sentent inférieurs aux autres, ce qui affecte très négativement l’estime de soi et la motivation. Ne soyons pas étonnés qu’à l’âge adulte nous sommes si nombreux à souffrir de manque de confiance et d’estime de soi, que nous trainons les pieds à la levée du jour pour aller travailler, etc…

On évalue aussi le comportement des jeunes – dès la première primaire (ou parfois même en maternelle !) l’enfant reçoit une… gommette : « élève studieux », « paresseux », « fripouille », « timide  mais poli », « gentil », et bien d’autres. Parfois, ces gommettes l’accompagnent tout au long de sa vie.

« Je considère cette mutilation des individus comme le pire mal du capitalisme. Tout notre système d’éducation souffre de ce mal. Une attitude de compétition exagérée est inculquée à l’étudiant, qui est dressé à idolâtrer le succès de l’acquisition comme une préparation à sa carrière future. » – Albert Einstein

4.      Le redoublement

 Il a été démontré que le redoublement n’est pas seulement coûteux mais, surtout, il n’est pas efficace. En redoublant, le jeune ne rattrape pas son retard. Dans notre pays, nous pratiquons « le redoublement précoce ». Dès le plus jeune âge, l’enfant qui « ne suit pas » le cours est diagnostiqué – souvent à tort – dyslexique ou TDH/A, et envoyé chez les psychologues ou logopèdes. C’est juste une belle façon de camoufler le réel problème.

Le prof va dire : «Il ne s’investit pas », « Il n’est pas motivé » « Il n’écoute pas », alors que le jeune dira : « Je ne comprends pas le prof », « Je ne comprends pas la matière » ou « Le cours va trop vite ».

Le jeune qui a redoublé devient, les années suivantes, le bouc émissaire des profs, ce qui nuit gravement à leur estime et confiance en soi. Ils se disent « nuls », ressentent la honte, et cette étiquette les accompagne jusqu’à la fin des secondaires, si pas toute leur vie. Il y a aussi le regard de ses camarades d’être moins bon, plus lent.  L’enfant, intérieurement, vit cela comme une injustice ou agression, et fuit dans le jeu de rôle d’un personnage où il s’affirme artificiellement, ce qui favorise le décrochage scolaire.

5.   Le schéma : « Tu dois obéir à l’autorité »

On exige des enfants l’obéissance et la subordination – dès le début de leur parcours éducatif. A l’école, il est évident que l’institutrice ou le prof a toujours raison, et l’étudiant ne peut pas discuter avec elle/lui.

En effet, presque tout ce que le prof dit est pour l’enfant ou le jeune comme une prophétie. Souvent, cela affecte le chemin de la vie de l’enfant, qui croit aveuglément et sans aucune critique, en chaque mot prononcé par le prof.

« Tu n’as pas de capacités », « Tu ne seras jamais bon en maths », « Tu es le plus mauvais élève en classe » – un enfant y croit facilement, et le pire est qu’il commence à le penser vraiment, souvent pour le reste de sa vie.

Tout signe de manque d’obéissance à l’autorité (même l’envie de discuter, exprimer sa propre opinion !), est immédiatement sanctionné, considéré comme un mauvais comportement et quotté dans le journal de classe ou pire – on lui attribue un point de comportement. Kesako ? Si le jeune a récolté plus de X de ces fameux points de comportements, il risque l’exclusion de l’école…

« La pédagogie idéale des enseignants est de transformer un élève ordinaire en élève modèle. En élève, pas en adulte. Les profs se sentent supérieurs aux étudiants et veulent le rester jusqu’au bout, c’est-à-dire, jusqu’à ce qu’ils les transmettent aux prochains supérieurs. C’est la production massive des gens irresponsables. »

6.      La manière de comprendre les talents humains

Il est très limité de penser : « soit tu as du talent, soit tu n’en as pas. » Le pire, c’est qu’une seule déclaration du prof peut modeler l’enfant pour la vie.

Il suffit d’une fois, l’enfant entend : « Tu n’as pas de talent pour les maths. Il est préférable que tu fasses autre chose.» Comment penses-tu que le psychisme de l’enfant sera influencé s’il croyait en ces mots ? Et dans la plupart des cas, il y croit car le prof représente pour lui l’autorité naturelle et le pouvoir.

Bien sûr, pour avoir du talent on a besoin de certaines prédispositions. Mais la clé est justement l’investissement en temps et un travail assidu et persistant.

L’école a également tendance à extraire des talents et les séparer: dessin, musique, mathématique, écriture… Les enseignants ont tendance à oublier ce que la richesse réside justement dans la fusion de ces disciplines. Leonardo da Vinci était peintre, architecte, philosophe, musicien, écrivain, explorateur, mathématicien, mécanicien, anatomiste, inventeur et géologue.

7.      La hiérarchie des matièrescours matière

Selon le système éducatif, les matières les plus importantes sont les plus utiles pour le fonctionnement de la société actuelle du point de vue de la conjoncture économique. Ce qui signifie que si tu aimes peindre, danser ou chanter, tu vas avoir des difficultés, car étant l’enfant, tu es presque obligé de renoncer à ce que tu aimes et ce en quoi tu as un talent naturel.

Le monde a changé d’orientation depuis longtemps. Il s’est requalifié, et de nouveaux domaines, de nouvelles branches et niches du marché apparaissent presque quotidiennement. Maths ou dessin, physique-chimie ou chant, aucun n’est aujourd’hui plus important l’un que l’autre.

8.     Le classement des matières en sciences fortes et sciences humaines

Cette répartition fait que l’étudiant qui a été évalué tel un esprit fort, d’office supprime la capacité en sciences humaines (car, après tout, il a les prédispositions pour sciences fortes) et vice versa.

Les plus grandes innovations, inventions et idées de génie proviennent d’une combinaison de disciplines, plutôt qu’avec leur séparation. Leonardo da Vinci était un génie grâce à la faculté de naviguer entre différents domaines et compétences.

Ce classement est faussé et chacun (s’il investit du temps) peut exceller en reliant les deux disciplines : sciences fortes et sciences humaines. La question est à combien chacun est prêt à s’investir dans un domaine ou un autre.

9.      Chaque enfant est mesuré avec « le même mètre »

Tous les enfants et les jeunes doivent savoir absolument la même chose et apprendre de la même manière. Le système éducatif ignore complètement le fait que chaque enfant est différent. Chaque enfant a sa propre façon d’apprendre, de comprendre le monde, d’assimiler et mémoriser les informations.

Chaque jeune est différent et chacun d’eux a des rêves et passions différents. Au début de l’aventure scolaire les enfants et les jeunes devraient, chacun indépendamment, ou à l’aide des parents, spécifier leurs besoins en matière d’éducation. Le choix d’études devrait se faire en fonction des compétences de chacun. Chaque élève devrait prendre un chemin personnel d’évolution, conçu de façon à ce qu’il permette de développer ses talents, compétences et qualités.

10.  Surcharger les jeunes avec quantité d’informationsdécrochage scolaire

Chaque jeune est contraint de lire des piles de livres tous les mois, de bachoter des dates et des formules, de rédiger trois interros chaque semaine et faire énormément de devoirs tous les jours.

L’esprit du jeune est rapidement saturé, ce qui freine sa croissance intellectuelle et affecte négativement le développement de ses compétences. Il n’a pas besoin de connaissance, mais de pratique (expérimenter, faire des activités manuelles, des activités liées en relation au corps, développer l’empathie, les relations interpersonnelles).

Plus de 70 % des connaissances acquises de cette manière, s’envolera des jeunes têtes avant même la fin du secondaire, et, ce qui est pire, va handicaper le jeune dans sa recherche et l’acquisition de compétences à l’âge adulte.

La surcharge de tests, d’interros, de contrôles et d’examens est un moyen parfait pour faire pression sur les jeunes, ce qui cause un stress chronique et tue efficacement les cellules gliales du cerveau, alors que durant cette période, les jeunes devraient avoir un espace confortable pour apprendre en s’amusant, en explorant et en expérimentant.

11.  Tous les enfants de la classe sont du même âge

L’opération de créer des classes d’enfants du même âge agit parfaitement à l’exécution de la discipline – la même étape dans le développement psychique, et par conséquent, des réactions similaires. Nous ignorons complètement le fait que chaque enfant est à un niveau différent de capacités cognitives et intellectuelles. Ils ne devraient donc pas étudier la même chose.

Ce fait introduit une fausse image du monde – nulle part ailleurs, en dehors de l’école, il n’existe une situation où nous nous retrouvons uniquement entre gens du même âge. Au travail, au bureau, à la banque, au supermarché, dans une salle de sport, à la piscine, au restaurant : partout nous rencontrons des gens d’âge différent. Nous devrions donc apprendre à nos jeunes à vivre dans cette société.apprendre par l'action

12.  Enseigner aux jeunes des choses inutiles

Objectivement, nous ne sommes pas en mesure de spécifier quelles connaissances et savoirs sont utiles ou pratiques. Cela dépend de ce que notre jeune voudra pratiquer et expérimenter dans la vie. En conséquence, les ressources que nous devrions montrer ou transmettre au jeune dépendent de ses besoins individuels. L’école ne s’adaptera jamais à cette vérité universelle.

Personne à l’école ne sait répondre à quoi exactement nous servira tout le savoir qui nous est bachoté dans la tête. Les profs disent « cela te servira un jour ». Il n’est pas étonnant que les jeunes ne soient pas motivés à étudier toutes ces formules arides et inutiles.

L’imagination est plus importante que le savoir.”- Albert Einstein

13.  Enseigner aux jeunes d’une manière ennuyeuse

Les profs (pas tous !) enseignent aux jeunes des choses ennuyeuses d’une manière ennuyeuse. Les jeunes se sentent découragés, et parfois même, développent une sorte de phobie associée à « bachotage = école ».

L’enfant reçoit un message simple: « Le monde présenté à l’école n’est pas intéressant. L’apprentissage est difficile et désagréable.» Ainsi il arrête de découvrir le monde et perd le dynamisme de l’enfant pour explorer tout ce qui est nouveau.

Ce n’est pas la faute des enseignants, car on ne leur a pas appris comment apprendre à apprendre ou comment transmettre le savoir. Chaque employé de l’école devrait être solidement formé sur des méthodes d’apprentissage efficaces et pratiques.

« L’humiliation et l’oppression mentale des élèves par des enseignants ignorants fait des ravages dans les jeunes esprits, causant à l’âge adulte des résultats déplorables, qui ne sont plus possible à réparer. » Albert Einstein

14.  L’omission des compétences clés

L’école ne tient pas compte des compétences qui nous sont essentielles pour vivre dans le monde moderne.

Le système d’éducation n’inclut pas dans les programmes des matières telles que : l’intelligence émotionnelle, l’intelligence financière, les relations interpersonnelles, les aptitudes à la communication, l’esprit d’entreprise, la résolution de problèmes, le bien-être, la méditation, la gestion de l’avenir, la gestion du temps et beaucoup, beaucoup d’autres.

“Le mot progrès n’aura aucun sens tant qu’il y aura des enfants malheureux.”- Albert Einstein

Et ceci n’est que la partie visible de l’iceberg. Cependant, j’ai l’espoir que cela suffit pour que tu aies un regard différent sur le système d’éducation actuel.

Peut-être, te demandes-tu quoi faire avec tout cela ? Je sais, nous avons besoin d’une véritable révolution dans notre système éducatif.

Cependant, je n’ai aucune prétention de changer quoi que ce soit dans le système scolaire actuel, parce que c’est un combat politique contre des moulins à vent. Je crois que la révolution devrait commencer d’abord en chacun de nous, pas par le système dans sa globalité. C’est comme remplacer les politiciens….quand la politique reste la même… C’est dans nos esprits que le changement devrait naitre pour que nous puissions changer et améliorer la vie scolaire de nos jeunes. Je tiens donc à m’engager dans la promotion des alternatives solides qui puissent permettre à nos jeunes d’apprendre des choses utiles d’une manière intelligente.

Je rencontre des personnes qui agissent réellement dans le domaine de l’éducation, et à ma grande surprise, elles sont très nombreuses. Elles sont conscientes du problème et je sais que le changement est juste au coin de la rue.

Si tu es parent et que tu as des enfants qui vont à l’école (primaire, secondaire ou à l’université) tu te demandes, peut-être, ce que tu peux faire. Tu ne peux pas attendre des réformes et révolutions, parce que ton enfant a besoin de l’éducation ici et maintenant.

La bonne nouvelle est qu’en tant que parent, tu peux faire beaucoup. Tu peux prendre soin que la vision du monde de ton enfant ne soit pas ravagée par le système d’éducation.

A travers des discussions, des jeux, des exercices et de la pratique, tu peux protéger ton enfant contre l’endoctrinement qui restreint ses schémas mentaux. Tu sais déjà ce qui ne tourne pas rond dans l’éducation scolaire. Lorsque ton enfant est avec toi, je t’invite à faire les choses différemment.

Je t’invite à partager dans les commentaires ton expérience avec l’école ou tes observations sur les enfants. J’invite à la discussion, au sujet de ce qui devrait être la priorité dans notre pays.

Source: http://www.potentiel-infini.be/

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