Par Yannick Roudaut (co-fondateur de la société Alternité)
Eusko au Pays basque, Sol Violette à Toulouse, Abeille à Villeneuve-sur-Lot, Galléco en Ille-et-Vilaine… depuis quelques années, de nouvelles monnaies se développent en France. Créées par des associations citoyennes et soutenues par les collectivités locales, ces nouvelles monnaies, diffusées sous la forme de billets, sont convertibles en euros et permettent aux citoyens d’une région de faire leurs achats ou leurs ventes dans une autre monnaie que l’euro.
Acceptées uniquement par des acteurs économiques engagés, elles permettent de redynamiser l’activité des centres-villes et de favoriser le développement de circuits économiques courts entre producteurs d’une région et consommateurs locaux.
Elles peuvent aussi circuler uniquement entre acteurs soucieux de promouvoir un développement durable. Dans ce cas, les acteurs non respectueux des critères environnementaux et sociétaux ne peuvent adhérer à l’association qui porte la monnaie.
MONNAIES ÉPHÉMÈRES
Autre caractéristique de ces nouvelles monnaies, leur aspect éphémère. Certaines d’entre elles sont dites « fondantes » : leur durée de vie est limitée afin d’inciter les utilisateurs à la faire circuler et non à la thésauriser ! Car l’enjeu est bien là : redonner à l’argent son rôle d’outil permettant de recréer du lien entre les individus sur un territoire donné.
« Le but n’est pas seulement de soutenir les petits commerces ou producteurs locaux, il s’agit aussi de récréer une vie de quartier », souligne Anne-Cécile Ragot, directrice associée d’Alternatives et Alliances, une agence conseil en innovation sociétale, qui travaille actuellement à la mise en place d’une monnaie locale pour revitaliser les villes de Grigny et de Vitry-Châtillon.
« L’enjeu est aussi social, poursuit-elle. Nous envisageons que les aides apportées aux personnes en difficulté sociale puissent se faire en monnaie locale afin qu’elles puissent faire leurs courses avec de vrais billets et non plus avec des tickets ou coupons alimentaires stigmatisants. »
CONCURRENCE AVEC L’EURO
Ces monnaies sont-elles en concurrence avec l’euro ? « Pas du tout », répondent les initiateurs de la monnaie basque baptisée Eusko. « Il s’agit d’offrir un outil monétaire, qui permet au final de créer des emplois locaux. Nous nous efforçons d’enlever de la tête des gens l’idée selon laquelle c’est une monnaie de substitution. Elle est complémentaire », précise un responsable de l’association de bénévoles qui porte cette nouvelle monnaie.
Lancée en janvier 2013, l’Eusko a déjà séduit près de 500 entreprises, commerces et associations, qui ont décidé de convertir quelques milliers d’euros en Eusko. Neuf mois après son lancement, les transactions réalisées en Euskos représentent l’équivalent de 180 000 euros, essentiellement sur Bayonne. Un succès qui en dit long sur le potentiel de ces monnaies alternatives.
En Grèce, dans certains quartiers d’Athènes, les habitants démunis sont allés encore plus loin. Ils ont redonné de la valeur à leurs savoir-faire en créant leur propre monnaie (le TEM) pour pouvoir continuer à se nourrir, à réparer leur voiture… et ce, sans avoir un euro en poche !
Source: http://www.lemonde.fr/
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