par Alain Degoumois

La conversation allait un peu vite pour elle, trop vite même… Il lui semblait qu’elle était entrain de bruler des étapes. Mais en même temps elle ressentait de l’impatience.

Quelque chose se profilait dans cette rencontre impromptue, mais quoi exactement ? La vie est étrange. Elle nous offre parfois des rencontres qui pèsent plus que d’autres et ne nous laissent pas indifférents. On sent qu’il y a un fil à saisir et à dérouler.

Pour calmer le jeu, elle dit sur le ton de la plaisanterie :

– Oh, vous savez, qui n ‘est pas un peu schizophrène de nos jours !

Le passant fait mine de s’asseoir sur un banc en face d’elle :

– Vous permettez ?

– Mais je vous en prie !

– Il ne s’agit pas de schizophrénie en fait. Je vous rassure. Puis-je connaitre votre prénom ?

– Sophia

– Enchanté Sophia, moi c’est Simon.

– Enchanté Simon…

Elle sentait que Simon avait besoin d’échanger, de communiquer. Il lui semblait qu’en cet instant tout était à sa place et que la personne qui se tenait face à elle faisait partie d’une pièce de théâtre dans laquelle elle se sentait à la fois actrice et spectatrice… La vie nous met parfois face à des événements qui semblent relever d’une logique hasardeuse qui nous dépasse.

Elle regarde les arbres et la course tranquille des nuages. Elle écoute le chants des oiseaux et les cris des enfants sur la chaussée.

Simon se tient simplement devant elle et parle avec cet accent de sérénité qu’elle reconnait de longue date. Le timbre de sa voix inspire la confiance. Par expérience Sophia sent tout de suite si elle a affaire à une personne qui joue. Mais cette personne ne joue pas, c’est du vrai de vrai. Son intuition lui indique un feu vert ouvert sur la route des possibles. Elle sourit, apaisée…

– Savez-vous ce que disent les indous lorsqu’ils se saluent ?

– Euh, non…

– Ils disent : Namas Te.

– Ah…

– Savez-vous ce que cela signifie ?

– Bonjour… Je présume.

– Egalement oui. Mais pas seulement. Cela signifie également : je salue votre nature divine… Et c’est là que tout commence…

– Qu’est-ce qui commence ?

– Le rapport à soi et à l’autre…

– Vous êtes psychologue ?

Surpris et amusé, Simon toussote…

– Nous sommes tellement de choses dans la vie. Certainement oui, il doit y avoir un peu de psychologue en moi. Mais si je vous dis : je salue votre nature divine, qu’en déduisez-vous ?

Sophia réfléchit. Soudainement ses yeux s’illuminent de compréhension :

– Que j’ai une identité divine je suppose…

– Que nous sommes de nature divine, plus exactement. Un simple salut détermine une prise de conscience que notre culture occidentale a totalement occultée. Est-ce que vous soupçonnez toutes les implications de ce simple bonjour ?

– Euh, je dois dire que j’ai jamais pensé à ça…

– N’avez-vous jamais lu que nous sommes des êtres spirituelles expérimentant la matière et non des êtres de matière faisait une expérience spirituelle ?

– Oui, mais ces notions me paraissent un peu floues pour tout vous dire. Certaines personnes pensent mêmes que nous sommes des êtres de lumière expérimentant la matière. Cela sous-tend d’ailleurs la notion de réincarnation. Moi je veux bien, la notion de réincarnation n’est pas une notion qui me dérange en soi. Je l’a trouve même cohérente lorsque j’analyse certains pans de ma vie. Il y a des choses que seul le concept de réincarnation semble pouvoir expliquer. Mais je ne suis plus d’accord lorsqu’on en fait une idéologie.

– Vous voulez dire que ce que l’on considère comme vrai ne doit pas être brandit comme une vérité ?

– En tout cas pas présenté de manière autoritaire et fermée. Il y a une façon de dire les choses sans imposer. Les mots sont important pour moi. Derrière les mots il y a un état d’esprit et c’est ça qui me touche ou non, pas les mots en eux-mêmes, bien qu’ils aient leur importance.

Elle réfléchit quelques instants et poursuit…

– Il y a un silence derrière les mots. Je suis sensible à ce silence. Ce silence détermine pour moi le sens des mots. Je veux dire, c’est comme une polarité ; positive ou négative. La paix ou la guerre, vous comprenez ?

Simon se gratte le cuir chevelu.

– Ecoutez, je suis désolé de devoir écourter cette conversation mais il se fait tard et j’ai une urgence. Je vous laisse mon 06 comme disent les jeunes, appelez-moi en fin de matinée, j’ai quelque chose qui devrait vous intéresser…

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