Le regret est le sentiment qui se manifeste quand nous pensons que notre situation aurait pu être meilleure si nous avions agi différemment dans le passé. Il a pour conséquence une absence de l’acceptation de la réalité, de ce qui se passe ici et maintenant. Le sentiment du regret s’associe à une pensée du genre « ma vie aurait dû être différente. »
Les regrets et les remords nous permettent aussi de prendre conscience que nous pouvons changer quelque chose. C’est un stimulus qui nous booste afin de nous faire agir.
Son compagnon habituel est le sentiment de culpabilité. Les personnes qui regrettent leurs actes (ou l’absence de ces actes) deviennent victimes d’auto-jugement. Ce fait approfondit l’état émotionnel destructeur et il devient difficile de s’en sortir.
Il existe deux types de regret :
-
Je regrette d’avoir fait quelque chose
-
Je regrette de ne pas avoir fait quelque chose
Ce qui est intéressant, en regardant les choses selon une perspective à court terme, c’est que nous avons tendance à regretter des choses que nous avons faites – une mauvaise décision au travail, une dispute avec le conjoint, d’avoir trop travaillé.
Selon une perspective à long terme, généralement, nous regrettons des choses que nous n’avons pas faites – un voyage de rêve, passer du temps avec nos proches, prendre du temps pour notre passion.
Je constate que 25% des regrets concerne ce que nous avons fait, et 75 % concerne de ce que nous n’avons pas fait.
Comment agit le regret ?
En résumé – si nous prenons une décision bien précise et, plus tard, que nous imaginons que notre vie aurait été meilleure si nous avions décidé autrement – nous vivons une sensation de regret.
- La décision
Plus une situation dépend de nos décisions qui y sont impliquées, plus grand sera notre regret. La personne qui est en retard d’une heure à l’aéroport et qui rate son vol, ressentira un regret moins intense qu’une personne qui manquera son avion à 5 minutes près. La seconde imaginera toute une série de décisions, qu’elle aurait dû prendre différemment – un autre chemin vers l’aéroport, une préparation plus rapide des bagages, etc.
Donc plus nous sommes proches de la meilleure version possible de la réalité, plus la douleur émotionnelle sera intense.
Un jour, j’ai lu une histoire qui parlait d’un homme, qui, pendant de nombreuses années, tous les jours, jouait ses numéros préférés au loto, toujours les mêmes. Un jour, pour des raisons inconnues, il a joué une combinaison différente. Et ce jour-là, les numéros qu’il jouait d’habitude avec tant d’assiduité sont sortis au tirage. Il s’est suicidé…
Dans une culture où les gens ont un spectre étroit de choix, le regret n’est pas un sentiment aussi commun. Plus le choix est grand, plus il y a de risque qu’une pensée vienne nous tourmenter : «peut-être je devrais faire autrement ? ». Dans les pays développés, où les jeunes ont des grandes opportunités de choix de carrière, le regret apparaît plus souvent.
- L’imagination
Quand nous regrettons quelque chose, nous créons dans notre tête une vision alternative de la réalité dans laquelle tout aurait pu se dérouler comme prévu, ou en tout cas beaucoup mieux que ce que nous vivons dans la réalité. Nous nous accrochons fortement à cette vision, et la douleur naît de l’écart entre ce qui aurait pu être et ce qui est en réalité. Plus l’écart entre les deux versions est grand, plus nous souffrons.
Du point de vue psychologique le regret comporte 4 étapes :
- Le déni (« cela n’aurait pas dû arriver! ») ;
- La consternation (le manque de compréhension quant à pourquoi j’ai choisi d’agir ainsi et pas autrement) ;
- Le désir de se punir soi-même (la culpabilité qui découle d’un manque de compréhension du choix) ;
- Persévérer dans la perversion (dans notre tête nous visualisons en boucle cette meilleure version de la réalité qui aurait pu se produire en répétant sans arrêt les points 1 à 3).
Des études ont pu montrer que des personnes ayant une écorce motrice du lobe frontal endommagée ne ressentent plus aucun regrets, ni aucun chagrin, et cela les handicape fortement dans leur vie quotidienne. Les sociopathes ne ressentent pas de regret non plus, ce qui leur permet de commettre des meurtres sans éprouver quoi que ce soit. Peut-on donc en tirer la conclusion que le regret a une fonction importante dans notre vie ?
Que regrettons-nous ?
- Selon les statistiques, 33 % de la population regrettent les décisions liées au choix de leurs études,
- Un peu moins regrettent le choix de leur cheminement de carrière, celui de leur partenaire, et les décisions liées au temps libre,
- Moins de 3 % des regrets concernent la sphère financière.
Autre fait intéressant : en recherchant sur Google les mots « regret » + « tattoo » (regret et tatouage en anglais), on obtient plus de 11,5 millions de résultats.
Il y a quelque temps, j’ai écrit un article sur une infirmière, Bronnie Ware qui a accompagné des centaines de mourants lors de leurs derniers mois de vie. Sur base de ses dialogues avec eux et des propos qu’elle a recueillis, elle a écrit un livre, qui répertorie les 5 plus grands regrets qui sont ressentis le plus souvent par les personnes qui vivent leurs derniers jours. Tu trouveras cet article ici: 5 choses que tu peux regretter avant de mourir
Comment faire face au regret ?
Le regret ne nous dit pas que nous sommes passés pour des nuls face aux autres. Il nous signale que nous sommes capables de bien plus.
Le regret, vu de ce point de vue, est une émotion constructive, quand nous savons comment le gérer. Il devient une information pour nous en nous signalant que nous négligeons nos désirs.
Les études démontrent que le regret est évalué en tant qu’émotion la plus « positive » de toutes les émotions « négatives ». Selon les personnes interrogées, le regret :
- motive à prendre des mesures pour améliorer ou réparer des choses, des situations ; par exemple, pour résoudre un conflit avec un être cher et faire en sorte de garder une relation sereine;
- motive à changer de direction dans la vie, par exemple parce que nous faisons toujours des choses que nous ne voulons pas faire;
- nous aide à éviter de prendre des décisions stupides à l’avenir;
- nous permet de mieux nous connaitre ainsi que de définir le sens de notre vie;
- renforce notre capacité à atteindre les objectifs fixés.
Alors, comment le gérer ?
- Premièrement, il est nécessaire de le comprendre la façon dont il agit et quelle est la raison de sa présence. Cette connaissance est la base grâce à laquelle nous posséderons une bonne relation avec cette émotion. C’est ce que je décris ci-après.
- Ensuite, nous pouvons distinguer les situations qui sont sous notre contrôle, et sur lesquelles nous pouvons agir, – par exemple, le regret de ne jamais avoir sauté en parachute -, et les situations sur lesquelles nous n’avons aucun contrôle, – par exemple, le décès d’un être cher-.
Dans le premier cas, la solution pourrait être de tirer des conclusions de nos actes passés afin de prendre des mesures nécessaires pour agir. C’est une sorte d’apprentissage.
Dans le second cas, le chemin vers la guérison est l’acceptation. Tu pourras en lire plus sur ce sujet ici : Acceptation est la clé de confiance en soi.
« Chaque jour est un nouveau départ. Considère-le comme ça. Reste à l’écart de ce qui aurait pu se passer, et observe ce qui peut arriver. »
– Marsha Petrie Sue
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- Du point de vue des habitudes mentales, il est important de briser le schéma de créer de la « meilleure » version de la situation.
Pour cela, voici un bon exercice : au lieu d’imaginer comment ce serait si nous avions pris une décision différente, je t’invite à imaginer comment la situation se présente en ce moment, dans ici et maintenant. Visualise la vie exactement comme elle est aujourd’hui.
- Le regret est une émotion qui est le résultat du fait que notre mental vagabonde dans le passé ou dans le futur. Je t’invite alors à abandonner l’imagination de tous les autres scénarios possibles, et de te concentrer sur le présent. Pour cela nous avons besoin de revenir à ici et maintenant chaque fois que nos pensées filent vers autre moment.
Cette pratique permet aussi d’apprendre l’acceptation, qui est la base dans la gestion des regrets et des chagrins dans les situations sans issue (par exemple, en cas de deuil).
- Cela peut être pour nous aussi une leçon, un enseignement. Au lieu de s’imaginer une meilleure version alternative de la réalité, nous pouvons nous concentrer sur le ressenti du regret dans l’ici et maintenant. Ressentir cette émotion, qui se trouve dans notre corps est la première étape afin de comprendre d’où elle vient et pourquoi elle est présente en nous. Lorsque nous considérons cela comme des enseignements (c’est-à-dire, par exemple, tirer des conclusions et mettre un plan d’action ensuite) le regret n’a plus de raison d’être et nous quitte. Nous nous en libérons…
L’habitude de fuir les émotions destructrices les ancre en nous et approfondit leur intensité. L’acceptation, par contre, de les ressentir consciemment est la clé de la liberté émotionnelle.
Souvenons-nous que la première étape sur le chemin de la libération du regret est l’honnêteté face à soi-même – reconnaitre que réellement nous regrettons quelque chose et accepter ce fait…
Lachto drom
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