par Yoann
Le mois dernier, Nicolas Sarkozy prononçait son premier discours à Châteaurenard en tant que candidat à l’élection, dans lequel il a révélé ce que seraient les leitmotivs de sa campagne. Lui qui nous avait habitués aux « kärcher… racailles… casse toi pauv’con… », et autres tournures fortes (rappelons que son slogan en 2012 était la France forte) a cette fois identifié l’opposant sous les traits du bien-pensant.
Dans Fais moi mal, envoie-moi au ciel, j’avais brossé à grands traits le « journal d’un bien pensant ». Alors bien sûr, quand j’ai entendu Nicolas himself y faire référence, j’ai tout de suite pensé : il a lu mon article ! Ou pas…
Cet adjectif-concept connaît depuis deux ans un regain d’intérêt chez les intellectuels de tous bords qui en usent et abusent, soit de manière péjorative afin de railler les opposants à leur pensée, soit en jouant sur les clichés afin de détourner les prétendues valeurs « bien-pensantes » pour en faire des vertus. Rappelez-vous la une de Libération du 5/10/15 qui titrait sous forme de bravade insolente : « Oui, on est bien-pensants ! Et alors ? ». Suite à quoi, Laurent Joffrin avait ajouté et signé dans un dossier l’article « Vive la bien-pensance » (Revue des Deux Mondes, mars/avril 2016), où il décrétait en être si cela signifiait adhérer aux valeurs universelles d’égalité et de justice… Mais ce n’est pas fini : un jury de linguistes allemand a décerné en 2015 la palme du pire mot de l’année (« Unwort des Jahres ») à celui de « bien-pensant », ce qui revient à dire: mot tabou. C’est à ne plus rien y comprendre !
Tout le monde s’y met et y va de son commentaire, au point que l’on ne sait plus si la bien-pensance est péjorative (comme le laisse entendre la définition du Larousse : « Personne dont les convictions religieuses ou politiques sont conformes à l’ordre (souvent péjoratif). »), si elle désigne les « réac » de droite ou les gaucho-intello, ou bien si en 2016, le mot bien-pensant serait le nouveau terme à la mode chez les intellectuels, synonyme d’universalisme et d’humanisme… Nous avons eu droit aux « bobos » il y a 15 ans. Et maintenant: les bien-pensants ?
Mais quand même, on garde de ces étiquetages sauvages le sentiment désagréable que des « intellectuels » et des politiques condescendants nous disent quoi penser (bien/mal) et comment y penser, en nous désignant un jour les gentils et les méchants (selon leurs propres intérêts économique ou électoral), puis en affirmant le lendemain son contraire, car le vent aura tourné entre deux. Voilà le manège que font tourner les vrais bien-pensants et dans lequel ils nous font valser.
Je vous propose ici de projeter un peu de clarté sur la notion de bien-pensance et de voir quels en sont les mécanismes. Mais surtout, je vous invite à vous défaire des pensées dominantes en retrouvant en vous la voie de la Vérité, la voie de l’âme qui n’a nullement besoin de maîtres à penser.
À l’école de la bien-pensance
Dans un pays comme la France de tradition catholique, les consciences ont eu largement le temps de s’imprégner des dogmes religieux jusqu’à pénétrer la moelle de l’inconscient –dont un particulièrement tenace, qui est celui du « bon chrétien » et de la fameuse charité chrétienne. Poussée à l’excès, l’idée de venir en aide aux plus démunis (la veuve et l’orphelin) a généré tout un mode pensée qui était de porter l’autre en lui indiquant ce qu’il avait à faire dans sa vie.
De nos jours, ceci s’exprime avant tout en famille, où l’affectivité (le besoin d’aimer et d’être aimé en retour) demeure très forte. Par affectivité, des parents qui souhaitent le meilleur pour leurs enfants et qui sont convaincus d’avoir raison, vont largement les influencer dans leurs choix (études, carrière, amour) en voulant sincèrement le meilleur avenir pour eux, le bonheur, la santé, etc. « Mon fils, tu seras docteur et tu reprendras le cabinet familial de père en fils… Ma fille, une femme de trente ans se doit d’être mariée… C’est pour ton bien ». Un bien-pensant est une personne qui a raison en tout! Voici le terreau de la bien-pensance : le conditionnement social, la tradition religieuse, l’objectif de réussite matérielle/économique.
La bien-pensance est la pensée rationnelle unique qui prend le dessus sur la voix de l’âme (l’être intérieur) et s’impose comme seul choix possible de vie
Le propre de la bien-pensance est de reproduire un ordre, parfois même en toute bonne foi, en étant convaincu d’avoir raison d’y adhérer (« je ne peux pas avoir tort, c’est comme ça ; la vie est ainsi faite ») et en désignant ceux qui rejettent le modèle comme étant déviants. La crème de la bien-pensance pourrait être : « Il faut réussir dans la vie ! » Entendez par là : la réussite sociale et matérielle que procurent l’argent, les honneurs et les plaisirs (hobbies, toutes les bonnes chairs, etc.). Au fait, ça ne vous rappelle rien ?
« Si à 50 ans on ne peut pas se payer une Rolex, c’est qu’on a raté sa vie… » (Jacques Séguéla, 2009)
Pour l’anecdote : Jacques Séguéla qui souhaitait défendre Nicolas Sarkozy en 2009 avait illustré à la perfection l’idéal de la bien-pensance matérialiste que représentait l’élite version Sarkozy. N’est-il pas pour le moins cocasse que le même candidat tire aujourd’hui à gros boulets sur les bien-pensants ?
Le bien-pensant, c’est l’autre !
Comme dans toutes les histoires, il y a les bons et les méchants, le bon grain qu’il faut séparer de l’ivraie. Séparer…
« (…) Regardons la réalité en face. Mesdames et messieurs les bien-pensants, fermez vos oreilles car vous allez être choqués (…) Le peuple de France, mesdames et messieurs les bien-pensants, a les yeux ouverts. Vous avez les yeux fermés ; voilà la différence entre vous, les bien-pensants et nous, le peuple de France… » (Nicolas Sarkozy, discours de Châteaurenard, août 2016).
Rien de nouveau et toujours la bonne vieille tactique de la division : eux, contre nous. Or, toute l’ironie est là : ce sont les bien-pensants eux-mêmes qui nous disent qui sont les bien-pensants ! Et la perversité de cette dialectique est qu’elle vise à la persuasion plus qu’à la vérité, en faisant passer pour vrais des points de vue personnels, motivés par des intérêts qui ne relèvent pas du Bien de l’Ensemble et qui séparent. « Je vous dis que j’ai raison, les autres ont tort. Choisissez bien, c’est l’un ou l’autre camp. »
La perversité de cette dialectique (eux contre nous) est qu’elle vise à la persuasion plus qu’à la vérité
Comment brouiller un peu plus la donne ? En pratiquant une technique bien connue des arts martiaux, qui consiste à utiliser l’attaque de l’adversaire (ici un argument) pour finalement la retourner contre lui. C’est ce qu’ont fait habilement certains intellectuels de la presse écrite en reprenant à leur compte le jugement qui leur était destiné pour en faire une vertu :
« Le mot bien-pensant est destiné à empêcher le débat. Il désigne les gens de gauche au sens le plus large du terme. Si vous n’êtes pas raciste, si vous êtes pour des valeurs plutôt universelles, si vous êtes plutôt hostiles au fait des mettre tous les musulmans à la mer d’un coup, vous êtes un bien-pensant. » (Laurent Joffrin au micro du Quotidien).
Du coup, le bien-pensant passerait (presque) pour une personne faisant preuve de bravoure, associée à un courant politique, et reposant sur des valeurs universelles d’égalité et de justice… FAUX! Le problème reste entier : il faut encore choisir un camp, se conformer à une forme-pensée qui définit pour nous les limites et les règles de ce camp par rapport à un autre. Voici l’impasse de la bien-pensance : elle ne peut en aucun cas prétendre à l’universalité, car elle porte en elle une séparativité basée sur des certitudes et des convictions.
Sortir de la bien-pensance
Ce qui rend insupportable les gens dits bien-pensants, c’est ce côté suffisant et sûrs d’eux-mêmes, qui donne l’impression qu’en dehors de leur vision du monde, nul salut n’est possible. « Vous êtes avec moi, ou contre moi / Vous avez tort et j’ai raison ».
J’ai conscience qu’en écrivant cela, on pourra m’opposer que moi-même, j’appartiens à un club de bien-pensants puisque j’affirme ma vision des choses. Que nenni ! L’erreur des gens bien-pensants est de vouloir faire triompher leur façon de penser en disant aux autres ce qu’ils ont à faire, comment ils doivent penser. Mais on a jamais à dire à l’autre ce qu’il doit faire –au risque d’entretenir avec lui des rapports de dépendance et de soumission (affective, intellectuelle) qui l’asservissent plus qu’ils ne le libèrent. En anglais, le terme nanny state (état nounou) définit un gouvernement surprotecteur qui interfère à l’excès avec la prise de décision personnelle…
En famille, le fait de surprotéger l’autre par affectivité (le faux-amour) constitue une entrave à sa propre évolution.
Aujourd’hui, il existe une partie de l’humanité qui vit une phase d’éveil de conscience. Cela se traduit par des ruptures de schéma, des crises sociales et sociétales qui sont en réalité les symptômes d’une mutation beaucoup plus profonde. Cette humanité en éveil, c’est la fine fleur de l’humanité qui prend conscience d’elle-même et qu’une nouvelle voie existe. Une nouvelle voie d’Être à Soi, et d’être ensemble. Il ne s’agit pas d’un mouvement politique (la troisième voie du centre), mais d’une pensée libre qui a cessé d’adhérer aux pensées collectives de masse, aux égrégores des traditions (du style: il n’y a qu’une seule vie) et ceux des foules (la crise, le terrorisme)… Cette humanité peut enfin voir le jour, car les tenants de l’ancien monde, les dévots et les idéalistes du matérialisme perdent pied avec cette nouvelle civilisation.
Sortir de la bien-pensance, c’est sortir de l’ère du matérialisme et des conditionnements pour entreprendre de réussir sa vie qui est la seule obligation de l’âme
De la bien-pensance à la bienveillance
Les acteurs de la nouvelle civilisation (politiques, scientifiques, artistes et artisans, économistes, juristes) doivent se distinguer des élites et intellectuels dominants en refusant de jouer leur jeu. Cessons d’entretenir leurs luttes intestines pour la conquête du pouvoir (eux contre nous) et arrêtons de nous identifier à ce qu’ils définissent pour nous comme étant juste ou bon. Les voiles du mensonge et de l’illusion sont ceux qu’ils essaient de maintenir à grands renforts de discours, de rhétorique et qui masquent en fin de compte l’iniquité de cette vaste mascarade « démocratique ». Les bien-pensants qui nous gouvernent (pas seulement au sens politique, mais économiquement et médiatiquement) constituent l’oligarchie bien-pensante, accrochée à ses traditions, ses privilèges, ses avantages, etc. La note clé qui donne la tonalité à cette nouvelle civilisation des justes relations humaines, c’est justement la bienveillance.
Être bienveillant, c’est veiller au Bien de l’Ensemble, en aidant l’autre à devenir meilleur par nos pensées, nos paroles et nos actes –sans lui dire ce qu’il a à faire, ni comment penser.
Le monde actuel manque de ce qu’on pourrait appeler l’intelligence du cœur. L’intellect, qui est le raisonnement (le mental concret) produit des pensées rationnelles qui étouffent le ressenti profond, qui lui, est connecté à l’âme. Grâce au contact de l’âme, la réflexion jusque là rationnelle, prend une dimension supérieure en s’ouvrant au cœur, l’Amour-Sagesse. Ainsi, nous devenons plus qu’un individu, plus qu’une personnalité avec un caractère : nous devenons un être à la fois intelligent et spirituel en action, pénétré de sa conscience qui voit au-delà des intérêts égoïstes et matériels. « Juste quelqu’un de bien / Le cœur à portée de main… »
Trop beau pour être vrai ?
Aurais-je mis mes lunettes roses pour écrire tout cela, en haut de ma tour d’ivoire ? Certainement pas ! Ma tour parisienne est faite de béton, comme beaucoup d’autres et c’est sans lunette que je vous écris !
Nous assistons en ce moment même à une phase décapante de révélations qui mettent à mal l’ordre établi. Un peu partout, des êtres osent dire avec courage ce qui est juste, quitte à sortir du rang, à se démarquer et même à se faire disqualifier pour faire voler en éclat les structures actuelles. Personnages publics et illustres inconnus, ils se battent dans leur propre milieu (médias, agronomie, médecine/recherche, politique, droit) et dérangent l’ordre établi qui dicte la manière de penser. Dernier exemple en date : le Pr Henri Joyeux (cancérologue) radié de l’ordre des médecins pour avoir dénoncé l’abus de vaccinations. Cela montre à quel point ceux qui détiennent les rennes (le centre du pouvoir) ne supportent pas la liberté de conscience et l’affirmation d’une pensée contraire, ou alternative à la pensée établie. Ces gens là ne souhaitent pas que nous grandissions en conscience. Le doute n’est pas permis –car c’est leur arme. « Notre produit, c’est le doute » (les lobbys industriels du tabac, de la santé, de l’énergie, etc.)
Soyons authentiques, soyons rebelles !
Soyez-en sûrs, des jours meilleurs arrivent, mais pour cela, il va falloir sacrément se déconditionner et oser être qui l’on est vraiment!
On constate de plus en plus que des êtres de tous secteurs sont prêts à risquer leurs acquis, leur confort matériel, leur tranquillité d’esprit et à remettre tout en question pour accomplir leur destin, ce qu’ils sont véritablement au plus profond d’eux-mêmes, et pour défendre la Vérité. Se libérer des bien-pensants et des formes-pensées collectives, c’est développer le discernement et rejeter l’affectivité qui nous empêche de nous libérer par peur de déplaire (à notre famille, nos amis, la société).
Finalement, le problème n’est pas tant d’être bien-pensant que de persister dans ses convictions et croyances. La clé de la libération de toutes les formes-pensées et de toute forme d’asservissement passe par la connaissance de Soi, et le déconditionnement aux attaches familiale, religieuse, politique et matérielle. Encore faut-il avoir l’honnêteté et le courage de les reconnaître… Courage ! Soyons Vrais, écoutons enfin notre cœur et quitte à passer pour des rebelles, soyons des rebelles de l’âme !
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