CHRONIQUE DE L’ÉVEIL – La réalité
Extrait de l’interview avec Jean Moret
X : J’ai assisté à votre conférence « le grand dépouillement » et je comprends pourquoi les gens vous considèrent parfois comme une « extraterrestre ». Votre enseignement est subtil, profondément déconcertant et pourtant il m’amène une joie indescriptible et une paix intérieure instantanée. Vous nous ramenez à l’essentiel sans grandes théories, ce qui modifie l’état de conscience en un seul instant, puisque le mental est très peu nourri. Je ne pensais pas que cela était possible sans outils, sans pratique de longue durée. En vous observant je me demandais quelle est votre motivation lorsque vous parlez au public ?
Y : Je n’ai aucune motivation, je n’aspire à aucun but. Là où vous voyez un être agissant, je vois la vie prendre soin d’elle-même. Ma véritable nature est immuable. Il n’y a ni action, ni pensée. Vous ne pouvez pas la percevoir, tant que votre attention se focalise sur le mouvement, le changement ou l’évolution.
X : Vos réponses ne sont jamais ordinaires.
Y : Pourquoi vouloir l’ordinaire, le connu ? Pourquoi ne pas plonger dans l’extraordinaire, l’inconnu ?
X : Je pense que nous en avons peur.
Y : Regardez la peur, sans aucune intention particulière. Observez-la, comme si vous contempliez un champ de fleurs. N’essayez pas de la dissiper ou de la transformer, ne cherchez pas à interagir avec elle. Dans cet état d’observation, vous réaliserez quelle n’est qu’un amas d’idées, issu de l’imaginaire.
X : La peur de la mort nous hante. N’avez-vous pas peur de mourir ?
Y : Je suis déjà morte.
X : Je vous vois pourtant vivante.
Y : Vous voyez vos projections. Vous percevez un personnage que vous appelez Nassrine, vous lui attribuez diverses qualités et vous pensez qu’il s’agit de moi. Mais cela n’a rien à voir avec ma véritable identité. Comment pourrais-je mourir si je ne suis jamais née ? Ce qui n’a ni début, n’a ni fin.
Y : Beaucoup d’humains souffrent d’anxiété ou de dépression. Est-ce que ce sont des symptômes imaginaires pour vous ?
X : L’illusion fait souffrir. La réalité est indolore.
Y : Comment vous viennent vos réponses ?
X : Elles sont entendues comme les questions que vous posez.
X : Vous ne réfléchissez pas ?
Y : Ce qui doit être dit est dit. Ce qui doit être fait est fait.
X : J’aimerais atteindre cet état.
Y : Aussi longtemps que vous vous prendrez pour une personne, vous verrez la vie à travers les yeux de celles-ci. Même en changeant tout le système de pensée, vous resterez toutefois limité. Les conditionnements, les questions, l’effort, l’agitation, le passé et l’avenir deviendront votre nourriture de base. Vous me demandez comment changer votre perception ? C’est très simple. Arrêtez de vous confondre avec cet être humain. C’est le meilleur point de départ.
X : Vais-je ainsi me réunifier a mon être véritable ?
Y : Dès l’instant, où vous croyez être cet humain, d’innombrables séparations illusoires sont engendrées. Vous divisez une unique énergie en deux. Vous dites il y « moi et le reste ». C’est uniquement parce que vous voyez les choses de manière séparée que vous avez envie de vous réunifier. L’un ne va pas sans l’autre. Et le simple fait de vouloir vous réunifier vous maintient réciproquement dans la séparation. Ce paradoxe doit être observé. Les notions telles que l’âme, l’incarnation et les vies antérieures en sont des effets secondaires. Vous n’êtes pas une entité séparée du tout. Vous êtes le TOUT. Mais comment vous serait-il possible d’en avoir conscience, si vous vous engluez dans la séparation ? Vous cherchez alors à résoudre des énigmes illusoires, vous tentez en vain de recoller des morceaux. Ne vous préoccupez pas des effets secondaires, allez à la racine de cette maladie qu’est l’identification. Vous aurez soudainement conscience qu’il vous est tout simplement impossible de vous réunifier à votre être véritable parce que vous n’en êtes jamais séparé.
X : Je suis perplexe.
Y : C’est merveilleux.
X : Je ne sais pas, si …
Y : Ne vous préoccupez pas de votre savoir. Vous en possédez déjà trop. Immergez-vous dans l’être. Vous savez que vous êtes. Pour commencer, établissez-vous dans ce simple constat « je suis ». N’ajoutez rien d’autre et le monde de l’illusion disparaitra.
Y : Que reste-t-il à la fin ?
X : Le silence… La réalité.
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