par Sarah Boucault
La personne sensible parle son langage propre, celui des émotions. Il s’agit d’une langue perceptive très intime, une langue où le cœur est toujours à fleur de peau et où l’on se sent vulnérable en permanence. Cependant, ces personnes comprennent très bien que la vulnérabilité peut être un don exceptionnel, un « tendon » psychique plein de force. De dangers bien sûr, mais pour minimiser les risques, il existe une arme puissante : l’intelligence émotionnelle.
La personne sensible a toujours été là, cachée et parfois même diluée dans le paysage. De même, nous savons tou-te-s qu’il n’est pas facile d’habiter dans un monde qui nous oblige à être semblable, à réagir de la même manière, à voir la réalité à travers la même vitre… comme si nous avions tou-te-s les mêmes dioptries et que nous parlions la même langue émotionnelle.
« Quand on est à l’écoute, on devient sensible, et être sensible, c’est avoir une perception intérieure de la beauté, c’est avoir le sens de la beauté. »
-Jiddu Krishnamurti-
Le quotidien de la personne hypersensible a souvent la forme d’un oursin ou la texture épineuse d’une rose. Tout blesse un peu plus et tout émeut davantage. Cela est étrange aux yeux d’un-e spectateur-trice immunisé-e ou qui ne connaît pas une telle sensibilité, aux yeux d’une personne qui, sans respect ni conscience, n’hésite pas à dire des phrases telles que : « Tu prends tout mal, tu devrait être plus « dur-e » et te dégourdir une bonne fois pour toutes ! »
Mais comment faire ? Selon les différents travaux comme ceux du docteur Ted Zeff dans son livre « Maîtriser votre hyper-sensibilité », on nous montre un système nerveux hypersensible et des aires cérébrales qui fonctionnent plus intensément, comme le cortex insulaire et les zones en lien avec l’empathie et la réactivité émotionnelle.
Il n’est pas possible « d’être plus dur-e » quand on a un cerveau qui s’adapte au monde avec une autre fréquence. Personne ne peut se transformer en quelqu’un qu’il n’est pas, personne ne peut non plus baisser le volume de ses propres émotions quand elles débordent, quand l’âme parle et quand la réalité, tout d’un coup, s’illumine d’incroyables nuances non visibles par les autres.
La personne sensible et le volume trop élevé de son environnement
Peut-être que vous avez un-e ami-e ou un proche que vous appelez -affectueusement- « Regarde-moi et ne me touche pas ». Son sens de l’odorat et du toucher attire l’attention. Il y a certains tissus qu’iel ne peut pas toucher car ils lui font mal, car ils lui provoquent des démangeaisons, car ils lui donnent des réactions allergiques.
Parfois, un simple pincement ou un son plus fort que la normale provoquent chez les personnes sensibles une douleur intense. Ce sont également elles qui, au milieu d’une réunion ou d’une fête, finissent par se retirer dans un recoin car elles ont envie de rentrer chez elles.
Leur seuil de perception sensitive est différente. De fait, comme l’explique Judith Orloff, psychiatre et auteure de Liberté émotionnelle : Libérez-vous de vos émotions négatives et retrouvez un parcours hors de la souffrance, toute stimulation est démultipliée par 50. Tout bien sûr n’est pas douloureux, car ce délicat seuil de perceptions et d’émotions a la capacité de s’harmoniser également avec la beauté de la vie, et de manière si intense que beaucoup de gens ne le remarquent pas.
Dire, donc, que l’hypersensibilité est un don n’est pas une erreur, même si la personne doit apprendre à être habile pour gérer et filtrer correctement chaque stimulation qu’elle reçoit. Quand elle y parvient, quand elle réussit à appliquer un bouclier protecteur face à son environnement pour prendre soin de son estime d’elle-même et de son intégrité personnelle, elle atteint un niveau de maturité sensitive exceptionnelle.
Ce sont ces personnes qui captent la singularité des détails, celles qui atteignent la plénitude dans le silence, dans les instants de solitude précieuse, là où toutes les activités, surtout les artistiques, deviennent vibrantes, comme une explosion synesthésique de sensations, de plaisirs, d’émotions subtiles difficiles à expliquer pour qui n’appartient pas à ces 20% de la population, dans laquelle on trouve les personnes hypersensibles.
La personne hypersensible et son monde de silence
Alex est resté prendre un café avec sa sœur après le travail. Il lui explique qu’il a passé la journée avec un nœud dans l’estomac et qu’il se sent profondément épuisé. Son chef lui a fait des observations concernant ses tâches en tant que chef de ventes, de petites critiques qu’Alex n’a pas bien prises. De fait, elles l’ont tant affecté que ses collègues en ont rigolé toute la journée, en ironisant dessus. Pire encore, il sait qu’au travail, on le surnomme « drama-queen ».
« Ne mépriser la sensibilité de personne. La sensibilité de chacun, c’est son génie. »
-Charles Baudelaire-
Cet exemple simple donne lieu à une réalité complexe que vivent beaucoup de gens hypersensibles et sachez qu’elle n’est pas seulement réservée aux femmes. La moitié de la population hypersensible est masculine, et ce sont les hommes qui sont les plus contraints par une société qui ne voit pas encore d’un bon œil « l’homme sensible ». Une personne qui vit ses émotions à fleur de peau, qui est blessée par les critiques, qui pleure facilement, qui préfère les sports solitaires et qui ressent toujours de l’empathie pour son entourage.
Même si l’hypersensibilité est un sujet connu par le grand public, les personnes qui continuent à se recroqueviller dans ce recoin silencieux duquel elles observent et se taisant, où elles ne se font pas remarquer et qui maintiennent des distances de prudence pour ne pas souffrir, sont nombreuses. Chacun-e survit comme iel peut dans un monde d’obstacles, nous le savons. Or, le respect et le principe de vie : « être et laisser être » devrait se ressentir dans tous nos environnements pour que nous atteignions tou-te-s une véritable plénitude personnelle.
Source: https://nospensees.fr