par Catherine Delorme
En 1996, alors que je terminais ma formation de thérapeute dans l’approche centrée sur la personne de Carl Rogers, un collègue qui participait à cette formation me propose de participer à un stage de tantra. « Ce serait bien pour toi me dit-il, moi je trouve ça vraiment éclairant. » Cela me faisait peur mais comme j’avais confiance en lui, et que j’étais malgré tout assez ouverte à l’aventure en matière de développement personnel, je me suis dis pourquoi pas ! Morte de trouille je m’inscris… Je savais qu’il me serait nécessaire de travailler sur ma sexualité mais j’étais très coincée sur ce sujet là et je n’avais pas trop envie ni d’en parler, ni de l’explorer en groupe. Dans ma vie je la vivais assez mal mais je n’en parlais pas, peu ou mal et je faisais souvent semblant. Malgré tout, je ressentais un appel au fond de moi, l’intuition que la sexualité pouvait rejoindre un idéal bien plus vaste que ce qu’elle représentait dans ma vie quotidienne. J’avais soif de spiritualité mais je ne voulais pas m’égarer ni perdre le lien avec la réalité. Je ne voulais pas d’un leurre de plus à coller sur une problématique déjà bien assez douloureuse.
La vie m’a fait d’abord une belle blague, mon collègue est tombé malade et était dans l’impossibilité de venir au stage. J’y suis donc allée seule, tiraillée entre l’enthousiasme et l’angoisse d’ouvrir une porte tellement intime, secrète, taboue…
Je ne savais pas à quoi m’attendre. J’avais entendu parler du tantra comme de quelque chose d’assez beau à vivre avec une belle philosophie mais les échos que j’avais sur le déroulement de certains stages ne me rassuraient guère. Mais bon, qu’est ce que je risquais ?
L’impression en rentrant de ce premier stage ? Celle d’être passée à la machine à laver en ayant exploré tous les programmes, y compris plusieurs essorages à grande vitesse. Wow ! je ne m’attendais pas à y rencontrer tous mes propres programmes d’un seul coup, sans y être préparée. Je me suis demandée à chaque moment ce que je faisais là mais j’étais touchée au plus profond de mon être. Quelque chose au fond de moi savait qu’il me serait nécessaire de continuer malgré tout pour casser cette coquille dans laquelle j’étais enfermée. Elle était suffisamment impénétrable pour protéger ma souffrance, mais elle ne protégeait rien en fait, elle me coupait de moi-même, avivait un sentiment d’isolement, de dépression latente, d’insatisfaction chronique de ne pas trouver l’Amour. Elle était également très imperméable et ne me permettait pas de recevoir ce à quoi j’aspirais le plus, l’amour, la reconnaissance, le sentiment de compter pour quelqu’un, etc…
Avez-vous aussi connu cela ? L’envie de recevoir, d’être aimée ? Et avoir l’impression que c’est comme la carotte que l’on met devant l’âne pour le faire avancer… cette foutue carotte n’est jamais accessible !
Malgré les cauchemars, les peurs qui remontaient, la colère contre l’animateur qui ne m’entendait jamais dans ma victimite – merci Sudheer – j’ai continué assidument pendant plusieurs années, au rythme d’environ un stage par mois plus les formations plus intensives. J’étais tiraillée entre mon ego qui se rebellait et mon Être qui me poussait. J’ai expérimenté la mise à nu à tous les sens du terme car les stages étaient très impliquants.
La personnalité à laquelle je m’identifiais se fendillait mais je résistais malgré tout beaucoup car cette personnalité était mon ancrage. Je souffre mais j’existe ! Qui serais-je si je laisse tomber l’armure ? Qui serais-je si je lâche mon identité de victime ? Ai-je vraiment le droit de m’identifier à l’amour, à la joie, à ma vitalité plutôt qu’à la souffrance et à la mélancolie ? Si je me dépouille de toutes mes souffrances que va-t-il rester ?
Quelle bagarre en moi entre ma tête et mon coeur !
Au bout de 2 ans de travail intensif en stage plus la thérapie que j’avais entreprise depuis le début de ma formation de psycho, la gangue a finalement cédé au moment où je m’y attendais le moins. Lors d’un stage intensif d’une semaine sur le thème de la colère pendant lequel je ne sentais pas ma colère (en fait, je ne me sentais même pas concernée par le sujet !!! alors que j’en étais pleine mais je l’avais bien cadenassée) mon armure a cédé d’un coup, l’énergie kundalini s’est enflammée tel un volcan et m’a traversée de bas en haut. C’est comme si, l’espace d’un instant, je m’étais dissoute dans ce tsunami…
Source: http://www.espacetantrayoga.com/
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