Sommeil

En voilà, une idée ! Mais par quoi vais-je commencer ? Voyons …

En fait, je me rends compte que je ne sais pas m’y prendre ni par quel bout envisager cette expérience.

Certains vont me proposer de faire une relaxation, mais je sais que mon cerveau aura tendance à continuer son chemin, et certainement pas envie de faire une pause, même si j’appuie sur la bonne touche. Ou alors, serait-ce l’idéal de débuter cette expérience en méditant ? Puisqu’à l’évidence, l’art de la médiation permet de faire abstraction de tout l’entourage, à en oublier même ce que l’on est. Mais je m’aperçois que je suis assise et que mon dos se rappelle à mon bon souvenir. Je n’y arrive pas.

Peut-être est-il préférable que je me dirige vers le « non être », mais par quel bout commencer pour ne plus être l’humaine que je suis ?

Le long de mes réflexions, j’oublie une partie de cette petite phrase, qui est le mot « travailler ». Pourtant, comment puis-je à la fois travailler et me reposer ?

J’en conviens que la solution ne peut passer ni par mon mental, ni par ma raison, ni par mon intuition ou mon lâcher prise, ou toute autre formule que je connais déjà.

C’est alors que je m’imagine ce qui me serait agréable de faire, ce qui me procurerait une certaine joie dans le cœur, une légèreté insouciante tout en restant vigilante à ce que j’accomplis. Je prends conscience, enfin, que tout mon être « travaille » sans que j’y porte attention. Je respire doucement, mon cœur bat tranquillement, mon corps digère gentiment, et mes yeux s’étonnent de ce temps merveilleux. Et surtout, je me calme.

C’est dans ce moment, où je suis en plein travail au milieu de mon repos, que je vois la vie sous un autre angle. Je la regarde autour de moi avec compassion : la nature a tant de force et d’impulsion pour s’être parée de ses beaux plus beaux atours alors que le thermomètre ne s’y prête guère. Je sens les parfums des genêts en fleur qui viennent titiller mes narines aux aguets, réchauffés par ce timide soleil qui s’amuse encore à se cacher derrière de grosses pelotes de coton gris.

Mes sens en alerte hument les fleurs du jardin, entendent le cricri timide de la première cigale, sentent le vent, un peu trop frais à mon goût, faire frissonner ma peau, et c’est tout mon être qui s’identifie à son décor, ne faisant plus qu’un avec lui. Rien ne m’est étranger, mais tout me transperce vraiment, tant je suis ce décor aussi.

Alors, et seulement, j’épouse la Vie. Je l’enlace sans avoir à bouger, je l’écoute par tous les pores de ma peau et lui murmure une douce mélopée, qui berce ma quiétude.

Je me concentre encore pour ne plus rien percevoir, ni entendre, ni ressentir, puisque je suis devenue tout sans faire quoi que ce soit….

Cet aspect facile me repose de la Vie, sans m’en écarter, mais en l’embrassant à l’infini.

Qui a-t-il de plus doux que cela ? Rien. Le Rien.

Pour arriver à ce « travail » reposant, j’ai dû combattre mes idées reçues, éliminer mes a priori, débusquer mes craintes de ne pas y arriver, ranger mon mental fécond, ordonner à mon cerveau nébuleux, lâcher mes convictions profondes et surtout me faire confiance.

Voilà donc la dernière étape de cette petite étincelle qui tente de se cacher derrière toutes les autres étoiles brillantes. Ma confiance se joue de moi, elle s’absente pour de longs congés et réapparaît quand elle sait que je suis prête à tout lâcher. Elle se débine allègrement lorsqu’une décision grave pointe son nez, mais je la sais tapie sous le contrôle que j’aimerais avoir sur toute chose.

C’est sans attendre que je peux au mieux « être ». C’est en laissant la vie me promener dans les dédales et les ruelles de mes incertitudes que je me régale le plus d’elle. C’est uniquement quand je m’attends à rien que tout se met en place… Et c’est ainsi que je travaille en me reposant.

Ne suis-je pas dans ce monde imaginaire pour ça ? Voir, humer, percevoir, m’émerveiller ou pleurer de tristesse ?

N’est-ce pas ça le jeu que j’ai choisi, déguisée en être « humaine » ? Sans aucun doute, tout cela en fait partie.

Cependant, le plus important pour moi, c’est de me rendre compte que je n’ai plus rien à apprendre, du moins intellectuellement, mais tout à reconnaître comme faisant partie de moi. De ma racine, celle qui me tient debout sur ce bout d’Univers, jusqu’à mes pensés perchées dans les étoiles, je suis l’infini, dans la parcelle de mon cœur qui pulse l’amour qui m’a créé.

Ainsi, vous non plus, vous n’avez plus besoin d’apprendre, mais vous tourner définitivement vers l’être que vous êtes, sans ajouter de majuscule, car c’est celui-ci que nous avons choisi, et qui habite, notre corps de chair et d’amour.

Travailler à se reposer peut prendre du temps, de l’énergie, de la patience, pour enfin toucher du doigt que la Vie est ainsi : elle est, elle agit. Tout comme vous êtes et vous agissez.

Alors, est-ce que travailler en vous reposant vous plairait ?

Oublions nos efforts pour « changer » : nous sommes parfaits dans nos imperfections.

Oublions nos devoirs pour être encore mieux, ce serait rejeter la beauté qui nous anime déjà.

Oublions nos craintes de ne pas réaliser ce pourquoi nous sommes ici, puisque nous l’expérimentons déjà, depuis notre naissance dans ce monde de jeux. Celui où le Je s’est endormi, pour mieux laisser l’enfant des étoiles s’amuser à être Dieu…Vous !

 

Allez, assez travaillé à me reposer, je vais me reposer à travailler avec vous…