La Table d’Emeraude (tabula smaragdina) est, selon la légende, une tablette taillée dans de l’émeraude pur retrouvée dans la sépulture d’Hermès Trismégiste (« le trois fois grand »). Le texte obscur qui y était gravé fonda les bases de « l’hermétisme » du nom de son auteur.
Datant du VIe ou IXe siècle, il s’agirait d’une retranscription de Balînûs (nom arabe d’Apollonions de Tyane) qui l’aurait lui-même retrouvée dans le tombeau d’Hermès. Elle fût ensuite traduite en latin dès l’époque médiévale, et devint le fondement même de l’Alchimie.
Voici ce texte, en latin et en français :
Transcription latine :
Verba secretorum Hermetis – Verum, sine mendacio, certum et verissimum : quod est inferius est sicut quod est superius; et quod est superius est sicut quod est inferius, ad perpetranda miracula rei unius. Et sicut omnes res fuerunt ab uno, mediatione unius, sic omnes res natae fuerunt ab hac una re, adaptatione. Pater ejus est Sol, mater ejus Luna; portavit illud Ventus in ventre suo; nutrix ejus Terra est. Pater omnis telesmi totius mundi est hic. Vis ejus integra est si versa fuerit in terram. Separabis terram ab igne, subtile a spisso, suaviter, cum magno ingenio. Ascendit a terra in coelum, iterumque descendit in terram, et recipit vim superiorum et inferiorum. Sic habebis gloriam totius mundi. Ideo fugiet a te omnis obscuritas. Hic est totius fortitudine fortitudo fortis; quia vincet omnem rem subtilem, omnemque solidam penetrabit. Sic mundus creatus est. Hinc erunt adaptationes mirabiles, quarum modus est hic. Itaque vocatus sum Hermes Trismegistus, habens tres partes philosophiæ totius mundi. Completum est quod dixi de operatione Solis.
Traduction de Fulcanelli :
Il est vrai, sans mensonge, certain et très véritable : Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut, et ce qui est en haut est comme ce qui est en bas ; par ces choses se font les miracles d’une seule chose. Et comme toutes les choses sont et proviennent d’un, par la méditation d’un, ainsi toutes les choses sont nées de cette chose unique par adaptation. Le Soleil en est le père, et la Lune la mère. Le vent l’a porté dans son ventre. La terre est sa nourrice et son réceptacle. Le Père de tout, le Thélème du monde universel est ici. Sa force ou puissance est entière si elle est convertie en terre. Tu sépareras la terre du feu, le subtil de l’épais, doucement avec grande industrie. Il monte de la terre et descend du ciel, et reçoit la force des choses supérieures et des choses inférieures. Tu auras par ce moyen la gloire du monde, et toute obscurité s’enfuira de toi. C’est la force, forte de toute force, car elle vaincra toute chose subtile et pénétrera toute choses solide. Ainsi, le monde a été créé. De cela sortiront d’admirables adaptations, desquelles le moyen est ici donné. C’est pourquoi j’ai été appelé Hermès Trismégiste, ayant les trois parties de la philosophie universelle. Ce que j’ai dit de l’oeuvre solaire est complet.
introduction à l’hermétisme :
Les principes décrits sont étroitement liés à ceux de l’alchimie, c’est pour cette raison que ce texte leur est également très cher, et il constitue un pont entre ces deux disciplines. Voici donc une traduction de ce texte :
Il est vrai, sans mensonge, certain et très véritable : Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut, et ce qui est en haut est comme ce qui est en bas ;
par ces choses se font les miracles d’une seule chose.
Et comme toutes les choses sont et proviennent d’un, par la méditation d’un, ainsi toutes les choses sont nées de cette chose unique par adaptation.
Le Soleil en est le père, et la Lune la mère. Le vent l’a porté dans son ventre. La terre est sa nourrice et son réceptacle.
Le Père de tout, le Thélème du monde universel est ici. Sa force ou puissance est entière si elle est convertie en terre.
Tu sépareras la terre du feu, le subtil de l’épais, doucement avec grande industrie.
Il monte de la terre et descend du ciel, et reçoit la force des choses supérieures et des choses inférieures. Tu auras par ce moyen la gloire du monde, et toute obscurité s’enfuira de toi.
C’est la force, forte de toute force, car elle vaincra toute chose subtile et pénétrera toute chose solide. Ainsi, le monde a été créé.
De cela sortiront d’admirables adaptations, desquelles le moyen est ici donné.
C’est pourquoi j’ai été appelé Hermès Trismégiste, ayant les trois parties de la philosophie universelle. Ce que j’ai dit de l’oeuvre solaire est complet.
Ce texte est une description de l’œuvre de la Création, que nous pouvons entre autres retrouver dans l’arbre Séphirotique et maints textes sacrés de différentes civilisations. En se penchant de plus près sur ces phrases il apparaît que les principes abordés sont exactement les mêmes, ce qui est rassurant faute de quoi nous serions vite perdus dans toutes ces études.
Il est vrai, sans mensonge, certain et très véritable
Comme il se doit, les principes énoncés par la suite sont intemporels et immuables, tant que notre étude se déroule dans le cadre de l’Univers manifesté. Étant donné que le non-manifesté n’est pas appréhendable de notre point de vue, les vérités qui suivront pourront être considérées comme absolues, car non sujettes aux variations des mondes.
Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut, et ce qui est en haut est comme ce qui est en bas
Cette phrase renvoie à la loi des Analogies, qui veut que le macrocosme soit à l’image du microcosme, et vice-versa. Les schémas de créations sont semblables pour quelque objet que ce soit, par conséquent nous pouvons par ces analogies étendre notre compréhension des choses aux mondes qui nous sont invisibles. Évidemment les modalités de manifestation ne seront pas les mêmes, mais les principes directeurs le sont. (à titre d’exemple le principe Masculin/Féminin est nécessaire à toute création, ce qui se manifeste à notre niveau par la reproduction sexuée)
Si cette phrase est devenue si célèbre c’est pour la simple raison qu’elle offre une clé fondamentale et de grande valeur à tous les chercheurs de vérité. Elle a pour cela été élevée au rang d’axiome de la plus grande importance.
Par ces choses se font les miracles d’une seule chose.
Et comme toutes les choses sont et proviennent d’un, par la méditation d’un, ainsi toutes les choses sont nées de cette chose unique par adaptation.
Il est aisé de retrouver dans cette portion de texte, la référence à la loi du Mentalisme que l’on retrouve plus tard expliquée dans le Kybalion. Cela ramène une fois de plus au fait que tout ce qui existe en dehors de l’essence divine pure n’est rien d’autre qu’une projection mentale de cette dernière, et donc des adaptations et variations sur les bases de ce Noùs. Ces procédés de « méditation » et « d’adaptation » ne sont autres que ce qui est par la suite nommé « Œuvre solaire ». Cela rejoindra le fait que toute création ne possède aucune réalité véritable si ce n’est celle relative qui lui est accordée par son statut de « projection de la Réalité ».
Tout comme le Phénomène ne se trouve plus aucune légitimité lorsque le Noumène est dissocié de l’équation, toutes les choses font le miracle d’une car elles ne sont en rien différenciées de cette Matière Première.
Le Soleil en est le père, et la Lune la mère. Le vent l’a porté dans son ventre. La terre est sa nourrice et son réceptacle.
Nous avons ici affaire à un schéma de création ne présentant que des différences sans importance avec celui que l’on peut retrouver dans d’autres études comme la Kabbale. Il énonce tout d’abord le principe de Genre avec l’opposition du Soleil et de la Lune en tant que Père et Mère, donc traite de la nécessite de cette bipolarité horizontale nécessaire à toute manifestation. Ensuite une « gestation » donc une union des contraires par un stade d’équilibre, puis enfin une densification au niveau terrestre.
Rien de bien nouveau par conséquent (bien que chronologiquement ce texte soit bien plus ancien) si ce n’est l’analogie avec les 4 éléments (5 en vérité, l’Essence ayant été traitée durant le passage précédent): Soleil/Feu/Actif, Lune/Eau/Passif, Air/Réunion, Terre/Manifestation.
Le Père de tout, le Thélème du monde universel est ici. Sa force ou puissance est entière si elle est convertie en terre.
Ce passage fait office de conclusion à la première partie de ce texte, exposant synthétiquement les grandes lignes de cette Œuvre. Il est ainsi rappelé que le principe fondamental (Thélème) de l’univers créé(monde universel) est contenu dans cette Quintessence dont la méditation amène les mondes, l’élément qui amène les quatre qui le suivent. Et que la force de cet élément se trouve dans le fait qu’il investisse jusqu’à la Matière (la pénétration de Kéther dans Malkhut, du point de vue Kabbalistique).
Tu sépareras la terre du feu, le subtil de l’épais, doucement avec grande industrie.
Cette seconde partie du texte change quelque peu de registre car elle traite d’un domaine plus personnel, c’est à dire l’accomplissement de l’Alchimie Intérieure après avoir décrit précédemment l’Alchimie Universelle. Cette part est le travail que tout être doit réaliser.
Il est ici demandé de se purifier, de séparer les éléments lourds (Terre) de ceux évolués et subtils (Feu), dans une démarche méticuleuse et prudente, afin d’éviter une malencontreuse chute. Car cette Alchimie a pour but par son travail de « tri » de redonner à l’Être son statut d’Adam Kadmon, par l’anéantissement des couches grossières et superficielles.
Il monte de la terre et descend du ciel, et reçoit la force des choses supérieures et des choses inférieures. Tu auras par ce moyen la gloire du monde, et toute obscurité s’enfuira de toi.
Cette Force accessible au Travailleur se situe à la croisée des chemins, il est possible de la représenter par le centre de la croix, qui décalquée sur l’Arbre Séphirotique rejoindra Tipheret, etc… C’est le centre où l’Être est connecté au Père universel mais conserve la relation au Royaume terrestre qui lui permet de créer et de recevoir. En se trouvant en ce point, l’Homme agit comme un canal, et par conséquent n’est plus atteint par l’ignorance ni par l’ego. (l’une engendrant l’autre)
La gloire de ce monde qui est acquise par ce biais n’est autre que ce Corps de Gloire dont il est question dans certains écrits, c’est à dire le plus haut rayonnement qu’un homme puisse manifester dans ce monde, lorsque la conscience atteint son paroxysme. (nous pouvons également nommer cela Éveil)
C’est la force, forte de toute force, car elle vaincra toute chose subtile et pénétrera toute chose solide.
A ma connaissance il n’y a pas d’interprétation « infaillible » qui a été trouvée pour cette phrase. Pour ma part j’y verrais la nature de cet état d’équilibre symbolisé par ce point central, qui de par sa position même permet de rayonner autant vers les mondes supérieurs qu’inférieurs et d’influer sur eux. (ce n’est plus vraiment un acte personnel, car comme dit précédemment il s’agit juste de se placer comme canal)
Ainsi, le monde a été créé.
De cela sortiront d’admirables adaptations, desquelles le moyen est ici donné.
C’est pourquoi j’ai été appelé Hermès Trismégiste, ayant les trois parties de la philosophie universelle. Ce que j’ai dit de l’oeuvre solaire est complet.
Cette partie fait office de conclusion, insistant sur le fait qu’il est possible de participer à cette œuvre créatrice afin de glorifier le Noùs, l’Esprit et de le révéler en nous. Cette synthèse est enfin présentée comme complète, et présentant les trois aspects de la Trinité.
Le qualificatif « Trois fois grand » attribué à Hermès, renvoie à cette triade contenue en la monade.
Voici donc un bref aperçu de ce qui est considéré par certains la base de toutes les traditions ésotériques. (il y a quelques éléments de par le monde tendant à penser que c’est exact mais rien ne permet de l’affirmer scientifiquement, de plus il est probable que la traduction étudiée ci dessus ne soit pas si ancienne bien que respectant l’enseignement de base)
L’assimilation de ces axiomes offre à mon avis une base d’une grande solidité permettant des développements (des « adaptations », comme il serait dit dans le texte) aussi sérieux que bénéfiques.
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