Sophia-Frelau1Par Sophia Frelau

Devant le nombre de thérapies et disciplines de développement personnel qui nous sont proposées, il peut être difficile, dans notre quête, de ne pas nous égarer en poursuites illusoires. Entre plusieurs voies spirituelles, diverses «pratiques douces», «thérapies brèves», et techniques soit disant énergétiques et spirituelles, souvent déposées en tant que marques, sans parler de la pléthore de stages et ateliers proposés, il peut être tentant de transformer notre quête en consommation éclectique et compulsive, sans guérison durable ni croissance véritable.

Au cours de sa quête, l’être commence généralement par rencontrer ses propres résistances et ses stratégies d’évitement. Ce qui en lui s’oppose à la remise en question et au changement, qui représentent souvent effort et inconfort. Ce sont les freins que nous devons desserrer un à un pour pouvoir avancer, et le fait de les dépasser constitue déjà une libération, une guérison et une avancée en conscience.

Seulement voilà, un grand nombre de thérapies et de pratiques proposent de satisfaire l’aspiration illusoire par laquelle nous aimerions que les choses changent pour nous sans rien avoir à changer profondément en nous. Elles proposent de satisfaire notre désir d’évoluer tout en ménageant et en alimentant nos addictions émotionnelles; de nous faire avancer significativement, mais selon les règles dictées par nos résistances : thérapies brèves voire express, où le thérapeute allège temporairement nos symptômes en nous soignant sans participation de notre part, où l’on ne ressent pas ce qu’il se passe en nous, faute d’être impliqué dans notre guérison.

Certaines techniques peuvent nous entraîner à nous exprimer d’une certaine manière, à nous présenter et à développer une attitude plus efficaces pour parvenir à nos fins et obtenir ce que l’on veut, mais servent-elles vraiment notre guérison et notre croissance ? A quel niveau ces disciplines agissent-elles ? Nous aident-elles vraiment à guérir au niveau causal et à grandir dans l’authenticité de qui nous sommes vraiment ? Ou a contrario nous enseignent-elles des clés pour devenir un individu lisse et productif tel que la société les valide, capable d’interagir avec le monde extérieur de façon plus efficace ?

C’est là toute la différence entre la croissance véritable et le développement personnel qui, lui, nous aide à créer et développer notre façade, cet ensemble d’éléments de «savoir-être», «compétences relationnelles», «savoir communiquer», formatage de la pensée et du langage, présentation, apparence, gestion et même contrôle de nos émotions, maîtrise de codes comportementaux et sociaux, culture, stratégies relationnelles, techniques et compétences (par opposition aux « dons » et à la sagesse), personnalité humaine etc., le tout sous-tendu par des paradigmes et croyances. Ces paradigmes et croyances mentales qui font partie de notre façade sont eux-mêmes maintenus en place par nos stratégies d’évitement de ce que nous préférons nier et ignorer de nous-mêmes. si bien que dans la démarche de développement personnel, ce n’est pas tant une guérison qui survient, que la « suppression » (l’évitement) de ce qui nous gêne.

Il peut être tentant de croire que si on parvient à ce qu’une émotion ne se manifeste plus, nous l’avons libérée : en réalité, si nous de l’avons pas ressentie, elle n’est pas libérée mais simplement enfouie, ce qui renforce notre contrôle et notre armure. Simplement, plus nous nous investissons dans le développement de notre façade, et plus nous avons tendance à nous identifier à elle.

Car c’est en-dessous de notre façade qu’est caché ce que nous aurions vraiment besoin de guérir pour commencer à connaître un changement profond, réel et sensible. Plus on développe notre façade, et plus elle devient comme une armure qui nous insensibilise et rend plus difficile l’accès à notre corps de souffrance. Ce corps de souffrance, largement inconscient mais bien présent, conditionne notre vie et notre loi d’attraction de façon aussi inévitable que parfaite. C’est la guérison de cette partie de nous, dissimulée sous la façade, qui permet le changement durable et nous permet de révéler ce qui est caché derrière : notre être authentique, dans sa beauté pure.

Odilon RedonD’une façon similaire, la recherche sérieuse et volontaire d’évolution nous amène parfois à consacrer beaucoup de temps à rechercher de l’information, pléthorique tant sur internet qu’en librairie, à lire, écouter, regarder sans cesse… Cette boulimie d’information spirituelle peut conduire à l’état illusoire où notre érudition et notre compréhension mentale en la matière nous donnent l’impression d’avoir parcouru du chemin intérieurement, alors que le contraste se creuse entre l’expertise accumulée (dans la façade) et notre niveau de transformation réel.

L’expertise nous donne parfois l’illusion d’avoir intégré ce qui ne stagne en fait que dans une partie du mental, et nous rend encore plus difficile le fait de voir et embrasser humblement tout ce que l’on porte en soi qui ne nous plaît pas. L’expertise devient souvent, elle aussi, une stratégie d’évitement, justifiant le fait de porter son attention sur ce qui est à l’extérieur plutôt que sur notre état intérieur.

Par exemple, se tourner vers l’accumulation d’informations, parler beaucoup de guérison et de développement, viennent parfois nous servir d’alibi et de distraction (à l’insu du soi conscient), prenant l’apparence trompeuse de ce que précisément nous évitons : à savoir le travail intérieur, ce travail au noir de guérison alchimique.

J’ai rencontré plusieurs personnes dans ma pratique et recueilli des témoignages sur beaucoup d’autres encore, qui après des années d’analyse (psychanalyse), sont enchantées du travail accompli, mais qui à la question «Et qu’est-ce qui a changé ?» se trouvent décontenancées et admettent : «Rien… Mais j’ai une excellente compréhension de mes problèmes, maintenant». Certes, les prises de conscience peuvent nous servir dans notre cheminement, mais pourquoi le fait de «conscientiser» le schéma, la blessure ou l’origine d’une erreur, n’amène-t-il pas la transformation ? Pourquoi n’amène-t-il pas tellement plus que la capacité à en parler ? Et lorsque l’on «conscientise», quelle est la partie de nous qui «conscientise» ?

Bien sûr, toutes les modalités d’accompagnement et thérapies proposées n’interviennent pas uniquement au niveau mental. Certaines thérapies nous impactent plus profondément qu’aux seuls niveaux physique et mental. Elles comprennent qu’en amont du corps physique, il y a le corps énergétique, ce champ lumineux, double énergétique de notre corps physique. Alors diverses thérapies peuvent avoir une efficacité au niveau du corps énergétique, en rétablir l’équilibre, en ôter les densités et pollutions subtiles, par exemple en nettoyant et stimulant les chakras. Elles peuvent même valider leur efficacité par des techniques de tests (test musculaire, radiesthésie etc). Simplement, combien de temps après le soin nos chakras restent-ils propres et actifs ? Combien de temps notre champ d’énergie reste-t-il sain et équilibré ? Combien de temps l’énergie circule-t-elle impeccablement dans nos méridiens ? Les affections de notre corps énergétique sont la cause de problèmes se manifestant en aval, aux niveaux mental et physique. Mais quelle est la cause de ces affections énergétiques ? Est-elle toujours au niveau du corps énergétique, ou peut-elle résider plus en amont encore ?

Les blessures de l’âme ne sont pas de nature mentale, et ce n’est pas au niveau mental que l’on peut les libérer et les guérir. Elles ne sont pas non plus situées dans le corps énergétique, et tous les soins énergétiques ne suffisent pas à les libérer et les guérir. Elles sont en amont, « fixées » sur la part la plus profonde, la plus authentique de notre être : l’âme elle-même, d’où ces blessures impactent en cascade notre corps énergétique et notre corps physique.

Bien sûr, toutes les pratiques œuvrant sur notre corps physique, notre mental, notre corps énergétique, ont leur utilité, et tous les niveaux de notre être méritent notre attention et nos bons soins. Mais si la cause originelle du déséquilibre est au niveau de l’âme, ce qui est généralement le cas, et si nous désirons la guérison et la croissance de notre âme meurtrie en une âme de plus en plus pure et entière, aimante et lumineuse, il ne suffit pas d’œuvrer en aval, aux niveaux physique, mental et énergétique. Et il ne suffit pas de se confier à des mains expertes, car si l’on peut nous donner des soins énergétiques, personne ne peut guérir notre âme à notre place : cette responsabilité nous appartient.

Les pratiques physiques, mentales et énergétiques peuvent nous apporter des tactiques, des palliatifs et un mieux-être rapide. Mais la différence est vaste entre la poursuite du bien-être et la voie de la guérison : entre la poursuite du confort, dans laquelle on reste dans l’évitement de ce qui en nous est jugé déplaisant à ressentir, et le chemin où l’on accepte d’embrasser l’inconfort transitoire qui permet le changement profond. Il nous est pour le moins inconfortable d’embrasser nos ombres, de ressentir nos blessures, d’exposer nos erreurs. Mais c’est là un acte d’acceptation inconditionnelle de soi, et non d’acceptation conditionnelle polarisée sur ce qui en nous est jugé agréable et acceptable. Or c’est dans un acte d’amour inconditionnel de soi que l’on se guérit et se libère au plus profond de notre être.

Les blessures de l’âme sont de nature émotionnelle. Nos âmes sont malades et alourdies de toutes les blessures émotionnelles que nous n’avons pas accepté d’embrasser et de libérer, et que nous avons ignorées. Alors, puisque le langage qui touche l’âme est celui de l’émotion et du sentiment, c’est au niveau émotionnel que s’opère la guérison. La guérison de l’âme est le contraire du déni et de l’évitement, elle est le contraire du jugement. Et elle est souvent, de façon transitoire, inconfortable.

Nicholas RoerichCependant, au bout de chaque tunnel traversé, nous trouvons bien plus que le confort; à force d’étirer notre âme, c’est un autre niveau, une autre qualité, une autre fréquence d’existence, qui nous devient peu à peu accessible, dans notre réalité tangible de chaque instant. Nous développons alors de plus en plus de désir de poursuivre. L’inconfort devient l’aune à laquelle se mesure notre mouvement, lequel nous fait nous sentir plus vivant. Embrasser nos ombres devient un véritable levier pour l’ouverture du cœur. A mesure que nous nous libérons de nos diverses résistances et stratégies d’évitement, nous acceptons l’inconfort tant redouté et découvrons en réalité légèreté et douceur, acceptation et sentiment d’unité, paix et liberté.

La guérison émotionnelle entraîne souvent la disparition de symptômes : des blocages se libèrent, des fuites énergétiques se referment, des douleurs et contractures disparaissent etc. C’est lorsqu’il intervient après la guérison au niveau causal (émotionnel) qu’un soin physique ou énergétique peut s’avérer le plus efficace, en complément de cette guérison, pour en faciliter voire en débloquer l’intégration à tous les niveaux en aval jusque dans les cellules.

Alors, pour cultiver le discernement et maintenir le cap dans la guérison et la croissance de l’âme, nous pouvons passer les ressources thérapeutiques et spirituelles au crible de quelques questions simples et ressentir les réponses intérieurement, en sachant que si la guérison au niveau causal demande souvent de l’aide et de la guidance, notre participation active, elle, est toujours nécessaire :

– Est-ce que ceci me connecte davantage à mon être profond, à mon âme, ou est-ce que ça développe la surface de mon être ?

– Est-ce que cette ressource est favorable à mon acceptation de toutes les parts de moi, ou m’incite-t-elle à rester dans le déni d’une part de moi ? (Vous serez peut-être surpris du nombre de membres de votre entourage qui peuvent vous encourager à supprimer vos propres émotions, à nier votre état d’âme, pour s’éviter l’embarras de vous voir les exprimer…). Est-ce que ceci me conforte dans la satisfaction d’une quelconque volonté d’évitement ?

– Est-ce que je sens que la personne qui est là pour m’aider fait tout à ma place et croit pouvoir me guérir, ou est-ce que je me sens sollicité et guidé peu à peu vers mon autonomie ? Est-ce que je me sens un peu plus placé devant ma responsabilité vis-à-vis de moi-même ? Suis-je maître de mon processus de guérison ? Suis-je en train de retrouver mon pouvoir ou de le donner ?

– Est-ce que ceci m’aide à trouver le confort dans mon statu quo, ou m’aide à évoluer hors de mon statu quo, quitte à mettre le doigt où ça fait mal (avec compassion et amour) ?

Seule la guérison au plus profond de notre être apporte un bien-être et des effets pérennes. A ce point pérennes que l’on oublie vite comment on se sentait auparavant. Seulement il ne s’agit pas de juger le cheminement des autres s’il diffère du nôtre, car chacun est différent, doué de libre choix. Chaque cheminement est unique, passant parfois par des étapes dont, de la perspective limitée du soi conscient, on ne comprend pas toujours l’utilité, avant de les avoir traversées.

Sophia FrelauSophia Frelau.

Source : http://www.terratantra.com/